Sujet: [BG] Ode à la saison des abysses Ven 2 Oct - 20:13
Ruvaen Daith’Tirith
« Ce qui torture le guerrier n’est pas les horreurs qu’il a vues, mais ceux dont il se sait maintenant capable.»
Pourtant fervent du culte de l’équilibre entre ordre et chaos, les Daelwenas primait davantage le premier au profit du deuxième. En effet, de l’ordre naquis le temps, cette ligne directrice quantifiable et abondante, permettait aux anciens de guider les plus compétents vers un rôle dans les diverses sphère d’influence de la communauté. En d’autres mot, il représentait l’adhésif permettant à leur société d’en être une. Suivant ce procédé, les perceptifs marchaient naturellement parmis les rôdeurs, les stoïque défendait chez les protecteurs et les ingénieux oeuvraient chez les artisans. Le chaos quant à lui représentait le royaume des possibilités, des idées et de la liberté. Il était à la fois craint et révéré pour être l’infinité du ciel: capable d’inspirer le rêveur comme de foudroyer le marcheur. Ce n’était que par sa nature entreprenante que l’ordre clamait plus d’influence chez les Daelwenas.
Or, dans la pratique de l’art, les Daelwenas voyaient une façon d’apprivoiser les forces morales de l’univers, en donnant une forme concrète à des idées abstraite, permettant ainsi à l’ordre d’épouser le chaos.
Cette harmonie était vu par plusieurs comme “le chemin” sans pour autant le percevoir, ils acceptèrent l’abstraction comme une vérité axiomatique. Les frères et soeurs d’Ilidelwis marchant déjà cette invisible voie, garantissait une paix spirituelle à tous jeune Daelwenas, s’ils pouvaient la suivre à perpétuité.
Si l’équilibre de mère-nature était bel et bien une voie au dessus des abysses alors le petit Daith’Tirith se trouvait éternellement au fond. Un véritable tohu-bohu d’idées se chamboulaient dans son esprit et l’irrésistible besoin de les suivre - peu importe leur pertinence - empêchait ses tuteurs de proprement le cerner. Ce comportement intempestif l’empêcha donc de se tailler une place au sein de la communauté, contrairement aux autres enfants d’Ilidelwis. Les arches de pierre et les passerelles de rondins n’avaient de secret pour lui, tant chaque infrastructure ne pouvait échapper à son inéluctable visite. S’en tenir à une vocation n’était pas pour lui et sa curiosité dévorante l’amenait à visiter tous les domaines sans jamais tarder d’y rester. Très tôt, les gens l’émerveillait et, malgré son apparente timidité, n’était pas rare de l'apercevoir tapis derrière un arbre entrain d’observer ses pairs. Ruvaen trouvait les interactions de ses camarades bien plus enrichissantes que les leçons données par les précepteurs. Sur son banc, à les écouter, il agitait doigts et orteils sans arrêt afin d’activement combattre l’ennui. Le petit aux oreilles acérées voulait voir le monde et il voulait le voir maintenant.
Cette impulsivité n’était pas commune chez les Daelwenas puisque vivre autant d’années ne leur avait jamais donner de cause pour l’empressement. Si bien, que leur érudits avaient archivés d’interminables encyclopédies relatant de tous les sujets imaginables. Il était donc possible pour la jeunesse curieuse de se renseigner sur le monde entier s’il passait assez de temps à la bibliothèque. La pratique de l’art, cependant, demeurait vastement plus complexe simplement parce qu’elle demeurait à la fois personnelle et intemporelle. En effet, peindre une fresque aux nuances d’automne pouvait être différente d’un artiste à l’autre et pincer les cordes d’une harpe ne donnera jamais le même accord tant l’expérience et l’humeur de ses compositeurs sont diverse. Sa perfection représentait donc l’apogée de la réussite individuelle car elle démontrait la maîtrise des forces de l’univers.
Cet amour inné pour la beauté se répandait jusque dans leur langage et l’art du dialogue avait depuis longtemps été élevé au rang d’ultime discipline. Pratiqué dans de véritables arènes de combat, les plumes et les esprits s'entrechoquaient afin de décider de l'avenir des enfants de Solicia. Les idées débattues allaient souvent bon train et la trame était constructive, respectueuse et équitable. Dans cette communauté où tous demeurent égaux, existait pourtant une hiérarchie sociale légitime, résidant dans cette réussite personnelle: celle de maîtriser l'art sous toutes ses formes. Une simple création concrétisait le mérite et permettait de devenir, dans le coeur des gens, un individu de valeur et de respect.
Pendant que ses pairs maniait le pinceau et la harpe, Ruvaen lui ne cessait de penser à son inévitable fin et à quel point cette réalisation rendait toutes ces pratiques ludique et futile. L’idée qu’il puisse mourir demain contenait le feu de sa passion dans une cage de terreur qui l’empêchait de mener à terme un quelconque projet. Ses pensées désordonnées emportaient ses interlocuteurs dans un maelstrom d’idées bien souvent sensées mais mal construite, le rendant face à autrui, à la fois loquace, difficile à suivre et épuisant. Parents et tuteurs se fatiguaient à lui répéter ses leçons et ses camarades fuyaient avec véhémence sa foudroyante compagnie. Chaque nuit, l’insomnie que cette pensée nourrissait le rendait si près du délire qu’il pouvait rêver de sa mort et la décrire sans plaisir, dans de sordides détails. À priori, ses enseignants démontrèrent de l’inquiétude quant à son état d’esprit mais celles-ci moururent peu à peu, à mesure que l’élève appris à mieux camoufler son âme torturée.
Cette cacophonie interne demeurait toutefois incessante et aucune paix ne lui permis de s’asseoir et de pratiquer. Les précepteurs de la cité, indésireux de porter le manteau de la culpabilité sur ses échecs, fusillèrent le jouvenceau de tous les reproches possibles, fût-il trop paresseux, maladroit, borné ou sot. Le heurt de leur mots et le néant de leur confiance ne l’aidait pas à s’améliorer: Ruvaen ne tenait toujours pas en place, perdait facilement intérêt et ne retenait rien du contenu d’un ouvrage. Ses talents en orthographe et en calligraphie laissait à désirer et ses dissertations philosophiques comptaient moin de mots que le verset de ses poèmes.
Il avait toujours le sentiment qu’une légion d’idée tentaient de sortir simultanément par le même corridor de son esprit.
On ne voyait pas en lui un artiste puisque son abandon au désordre prouvait que ses bases ne seraient jamais maîtrisées, ne lui laissant aucun moment à consacrer à quelconque création. À partir de là, le désintérêt pour lui fut total et cette marque le suivit partout où il allait. On ne voulait pas d’un bourdon chez les rôdeurs, d’un fainéant chez les arcanistes ou encore d’un cabotin chez les artisans. Son incapacité à retenir la moindre formule ferait de lui un piètre druide et son espièglerie, un bien mauvais prêtre. Ruvaen sentait qu’il était destiné à de grandes choses mais cette traînée d’échec souillait son âme d’un doute récurrent. Cette dissention qui l’envenima à un point tel que lorsque venait le moment de démontrer sa valeur, une frayeur palpable secouait son arc et la flèche manquait inévitablement sa cible. Ce fut donc pour lui, une adolescence isolée, seul contre tous ces Daelwenas soudées par la poursuite de leur art et personne pour donner voix à ses incontrôlables introspections.
À leur défense, lui-même ne pouvait les supporter.
Dans ses rares moments de calme, il déchaînait sur sa psychée une haine profonde, se questionnant sur son encombrante différence, sa flagrante inutilité et son avenir nébuleux. Sa conscience était à jamais cautérisée par le sentiment procuré par son expérience plutôt que le commun de ses pair, qui eux en mémorisaient cause et effet. En d’autres mot, si un camarade lui collait une droite, Ruvaen se remémorait la détresse causée par l’humiliation avant la raison de cette contusion.
Les Daelwenas normaux perçevaient la vie de façon tangible tandis que Daith’Tirith la découvrait à travers le ressenti.
Pour remédier à cette poreuse sensibilité, le jeune Daelwenas s’échappait dans l’inconnu, passait l’immense clairière sur laquelle chantait ses compères et escaladait le sommet du plus grand arbre en vue. De là, sans le bourdonnement des conversations, sermons et cantiques, Ruvaen arrivait à lire les ouvrages qu’il leur avait chapardé. Ces récits relataient presque toujours de contes où de valeureux Daelwenas avait vaincu sans équivoque une bien sombre adversité, sauvé l’intégrité d’un boisé en péril ou encore défendu avec vertue l’équilibre du monde. L’un d’entre eux avait pour trame narrative Solicia et suivait comme protagoniste une femme du même nom. Elle était brave et passionnée, véhiculant pour les siens la compassion d’une mère ours, à la fois capable d’un amour inconditionnel pour ses petits et d’une rage meurtrière et destructrice pour ceux s'en prenant à eux. Son favori s'intitulait “Les marcheurs fantômes” écrit par un ancien révélant indirectement ses croyances sur le châtiment que délivrait mère-nature sur le surcroît incontrôlable de ses populations.
Un groupe de Daelwenas devenu renégats après avoir défié l’antique et frivole noblesse avait juré de protéger le monde contre l’excès en ne répondant qu’à une ultime directive. À l’orée de chaque saison, ils marcheraient à travers les bois jusqu’aux recoins les plus sombre du monde afin d’y abattre toute vie sur leur passage. Ils firent serment de ne discriminer aucun vivant, n’excluant pas l’inévitable fratricide, allant même jusqu’à dénoncer l'inflexibilité de leur culture. Puisque cette collection de traditions non plus n’était pas exempt des lois naturelles, ils jugeaient nécessaire qu'un arbitre les gardent en respect. Selon ces marcheurs, le tumulte causé par leur compagnie serait rectifié par mère-nature qui, dans toute sa magnanimité, châtieraient ses agents une fois leur travail accompli.
Le serment était brave car les enfants de Lysaelle redoutait l’exil plus que la tombe. Sacrifier leur gîte, homme, femme et enfants sectionnait à jamais leur lien à la vie qu’ils avaient toujours connu. Cela fit d’eux des morts-vivants, ainsi brandirent-ils la mort comme étendard. En acceptant leur fin, ils avaient trépassés et par le fait même, surmonté l’effroi.
“Aucun souverain ne règne à jamais. Seule la mort est éternelle.”
Ruvaen admirait ces hommes et ces femmes pour leur engagement indéfectible à l’équilibre sempiternel du monde. Eux aussi nés sous Nasticia, avaient tous des antécédents nébuleux, uniquement révélé lorsque qu’ils frôlaient le trépas ou dans le but de faire avancer l'histoire. Beaucoup aurait hurler au sacrilège et à l’horreur mais Ruvaen comprenait leur fardeau: le doute tailladant chacun, les intrigues amoureuses qui les unirent et les divisèrent, le bris du serment de chacun et enfin, leur inévitable ruine. Cette dernière était l’unique expérience à laquelle il ne pouvait attester bien qu’il l’avait vécu en rêve des centaines de fois. Cette histoire lui rappelait à chaque relecture que toute entreprise avait un commencement, une continuité ainsi qu’une fin, peu importe son importance et sa grandeur.
Que même la mort pouvait mourir.
Camouflé des curieux et proprement captivé, le très curieux Daith’Tirith dévorait ces pages en respirant une paix momentanée, rare occurrence qu’il acceuilla avec un profond soulagement. Cette sérénité demeurait, bien sûr, jusqu’à ce que les rôdeurs d’Ilidelwis ne le déniche et ne le ramène dans le foyer de l’entropique et dissonante communauté, reine de sa tourmente. Cette fois, toutefois, le jeune eut envie d’être comme eux, de faire une promesse afin de poursuivre un but important. Sa tentative de vivre une existence contrôlée s’amorça donc, sous le serment d’accepter celle-ci comme elle se présentait et de tenir en main l’éclair de sa foi lorsque les abysses fermait ses griffes sur lui.
Mais l’âge adulte lui prouva qu’on ne se débarasse pas ainsi de ses vieilles habitudes. Dès lors, on le reconnut comme étant responsable de sa propre personne et libre de poursuivre sa vie comme bon lui semble. Ce qui fit obséder Ruvaen à la nébuleuse question “À t-on réellement le choix?”. Était-ce vraiment en notre possession? Sur cette terre, sous cette lune, sous le regard vigilant de Lysaelle, quel contrôle exerçait-il vraiment sur son rôle dans le schéma des dieux? Était-il un agent volontaire de sa déité ou simplement une extension inconsciente de son bras divin? Était-il l’acteur d’un drame, libre de résigner de son rôle à tout moment ? ou était-il la feuille d’un arbre à jamais porté par le vent? Les contes et légendes avaient cessé de lui procurer une paix intérieure, seul l’action promettait à son coeur un semblant de satiété. Devenu rôdeur, ses pas esseulés le guidait à travers les clairières les plus isolées de la forêt, là où le gibier se nourrissait de leur herbes longues. Assigné à ce terrain de chasse, Daith’Tirith l’arpentait chaque jour malgré cette aride redondance qui démangeait son irrésistible envie de tergiverser. Hélas, comme le voulait Lysaelle, sa nature revint au galop et le désarçonna hors de la route.
C’était toujours lorsque son esprit fuyait que son devoir emboîtait le pas. L’idée récurrente du destin lui revenait toujours comme une souillure tenace qu’on tarde à faire disparaître. Généralement en contrôle, il avait l’impression que c’était lors de ses fuites que Lysaelle le guidait là où il devait aller. Que l’esprit mortel percevait l’illusion d’être en contrôle alors que sa destination avait été écrite dans le livre des dieux depuis des lustres. Cette idée de n’avoir les reines de son existence l’enrageait et le réconfortait simultanément, un conflit interne mal noué qui ne l’aida guère à souder sa position sur le sujet.
Des secousses momentanées l’arracha soudainement à ses songes.
Deux cyclope à la peau ocre, assis sur leur interminable séant, dévorait leur prise avec une voracité sans égal. Cette race de géant, les Hortagh, était bien connue des éclaireurs d’Ilidelwis et célèbre pour avoir moin de cervelle qu’ils n’avaient d’yeux. Le babillard du forum était jonché d’avertissements et d’indication, tous deux en relation avec leur primitif village, situé aux confins de la forêt éternelle. Ces deux intrus étaient pourtant à des lieues de là et dangereusement près du terrain de chasse de la capitale. Ces brutes se restauraient à même une montagne de cadavres, notamment diverses bêtes de tailles différente, dont des élans, des cerfs, quelques daims et même un serpent géant. Un bref regard derrière révélait la faune malmenée, les arbres fracassées et les ronces piétinés par leur précédent passage. Sous l’amas aux couleurs terrestre, un contraste saillant obligea le jeune rôdeur à plisser les yeux afin de cerner ce dont il s’agissait. Le minuscule bras verdâtre et ensanglanté d’un Daelwenas, dodelinait mollement aux abords du monticule funeste.
L’accumulation de telle offense le rendit furieux et bientôt, comme si les dîneurs avaient flairé sa colère, débusquèrent aussitôt l’embusqué.
À la vue de leur levée, il foula la clairière à découvert. Le danger souffla un vent nouveau sur son esprit encombré. Comme si la promesse d’une entente survolait les champs battues de sa psyché.
Une force inconnue le poussait à l’action.
Un jeu de pieds latent préparait celui qui allait mourir. Son instinct sonnait les tambours de la retraite et une peur tentaculaire menaçait d’empêcher toute fonction motrice contraire. À mesure qu’ils l’encerclaient, leur confiance débordaient, réitéré au timbre des coups de poings contre leur torse. Une salive cramoisie perlait autours de leur crocs fissurés, tandis qu’ils se disputait déjà le mort-sur-pattes. Ce dernier en eut bientôt assez et mis fin à leur démonstration virile en se jetant vers eux. Sa véloce témérité lui permit d’échapper à la réponse colossale du premier géant qui fit voler la terre de son marteau. Toutefois, la secousse causé par la force de l’impact mis une pause à sa contre-attaque et ouvrit ses flancs à son deuxième attaquant. Le second Hortagh fut cependant incapable de saisir l’opportunité et recula plutôt d’un bond prudent afin de ne pas être pris dans l’arc de portée de son frénétique compatriote. Cette momentanée confusion permit à l’infime marcheur des bois de se ressaisir, de passer outre sa croupe puis terminé sa manoeuvre derrière lui. Deux éclats bleuté s’entre-croisèrent et labourèrent le talon d’achille du géant. Daith’Tirith n’attendit pas son reste et tenta d’étourdir le géant en passant sous ses massives jambes une fois de plus. Le mort-sur-pattes avait jugé juste: le cyclope cherchait maintenant son dérisoire adversaire à travers la brume montante.
Le rythme des frappes en mouvement du tueur des bois gagnèrent en célérité, suivant les battements de son coeur drogué à l’effroi. Cette stratégie ravitailla son moral, le poussant à redoubler ses effort sous le couvert des ombres cendrées. Son deuxième adversaire sonnait l'assaut, énervé par son égoïste parent, il envoya un coup circulaire de toute ses forces vers lui. Acculé par l’impossible esquive, le forestier se réfugia sous l’arche qu’offrait la croupe du premier. Le gourdin vint violemment percuter le bouclier de chair improvisé qu'était sa jambe et produisit un furieux craquement. Le mugissement cassé de son abri ambulant priva Daith’Tirith de son ouïe et la réverbération engendrée l’envoya rudement contre la seconde colonne musculaire bistrée du monstre. Un combattant tombait à la renverse alors que l’autre renchérissait, ne laissant aucun répit à l’homme vert. Sa frappe aux mains jointes promettait une mort sordide au rôdeur, prisonnier de sa surdité.
La peur de rencontrer sa créatrice germait toujours en son coeur. Ce bref moment de lucidité lui permit d’éclore, de contempler sa ruine, comme si, à la façon des marcheurs fantômes, il acceptait sa fin avec dignité. Pourtant, une partie de lui crachait au visage de la mort et inondait ses veines d‘un flot caquetant de vigueur. Ses dents soudées, sa poigne blanchit, même ses lames refusaient de lâcher prise. L’orage mental démontrait enfin une perçée et dans l’oeil cyclonique du chaos, ses idées se dressait contre leur cible comme des engins balistiques prêt à tirer.
Face à la mort, son être entier vibrait de vie.
Sa conscience déserta une fois de plus, le laissant tremper ses deux pinceaux azurs dans l’aquarelle cramoisie. Ses mains avaient agi d’elles-même et ses deux lames voletèrent jusque dans la jugulaire du géant, freinant nette son arc mortel. Hébété par l’attaque préventive, le cyclop mira les filets carmins qui teignit la fourrure décolorée qu’il portait. Le grondement qui suivit moissonnait une colère nourrie à l’agacement et le monstre cyclopéen les tira de son épais cuir pour les larguer de côté. Le massif sauvage rugit avec abandon, levant derechef un marteau déscisif. Son instrument de mort démesuré produisit un bruit d’os broyé qui eut tôt fait de satisfaire le cogneur. Cependant, sa victoire fut dérobé par la douloureuse folie vociférée avec explosion par son compatriote qui pleurait sa seconde jambe ruinée. Le guerrier des bois avait disparu et le titan n’avait pour butin de guerre que l’horrible hululement saccadé du vaincu qui avait abdiqué toute volonté de combattre depuis belle lurette. Devant cet énième échec, il déchaina son courroux sur la tête de son compagnon et répéta ses coups de massue jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une pulpe sanguinolente.
Son oeil injecté de sang foragait dangereusement les environs dans le but de cerner le prochain récipiendaire de sa colère. Son unique mire le trouva derrière lui, à moin de trente pieds avec un arc bandé entre les mains. Il n’eut le temps de voir qu’un éclair acérée avant de ressentir une douleur foudroyante qui le força à s'agripper le visage. Beuglant de rage et de douleur, l'estropié déchaina aléatoirement sa massue autours de lui, causant un séisme de cratères dissonants. Nouvelles lames en main, le gardien des sentiers embrassa le danger avec témérité et tua la distance avec son aveugle destinataire. Conditionné aux violentes rafales d’un esprit torturé, le temps autours de lui sembla filer à une vitesse risible.
Assourdi par l’esclandre meurtrière, le tueur se contenta de tailler son hôte aux sons des notes et des tons qu’il imaginait. Au fil du temps, le rythme des lames zélées gagnèrent en vélocité, si bien qu’elles nuancèrent les percussions mourrante du colosse, produisant les hauteurs gutturales voulu par l’artiste. Au moment du crescendo, les cuisses zébrée de pourpre flanchèrent sous l’assault et le limier vert jugea la créature suffisamment morte pour se contenter du silence. Sa transe meurtrière repu, le Daelwenas tremblait de tous ses membres, payant finalement cette taxe due aux efforts surhumains qu’il venait d’accomplir.
Quelques chose de différent parcourait ses veines. Une sensation exaltante, ressentie et comprise alors qu’il ne l’avait pas encore verbalisé dans son esprit.
Horreur, excitation, paix et angoisse.
Le sentiment d’avoir mis au sol plus grand que lui l’excitait, celui d’avoir chassé sa proie et de l’avoir éliminer le complétait. L’horreur d’avoir conduit cette éxécution avec si peu de scrupule, si peu d’hésitation le rendait dangereusement inquiet. La paix d’avoir enfin trouver un comble au vide qui décolorait son coeur s'avérerait peut-être plus couteuse qu'il ne le croyait. Rien en comparé à l’angoisse causée par les conséquences présagées par cette renaissance.
Sans compter la terrible sensation d’en vouloir davantage, foudroyant ses priorités une à une, remplacées par l’idée de répéter l’expérience. L'envie était polarisante... cette fois au timbre d’un différent instrument peut-être?
Ruvaen secoua cette idée et pesta immédiatement contre cette tourmente séductrice. Un déluge d’émotions contradictoire l’envahit soudainement et inspiration, extase, colère, révolte, dégoût et espoir …se menèrent une guerre navale sans pitié sur les eaux-trouble de son âme. L’expérience avait été révélatrice, le sens donné à cette entreprise marquait une ruineuse destination. Il s’en moquait, si son seul chemin vers la sérénité était d’éteindre la vie, alors il le ferait. Si le sale boulot se présentait et que mère-nature voulait qu'il en soit le videur, alors il deviendrait la main gauche de Lysaelle.
Comme l’éleveur qui élimine les animaux malades afin de garder les autres en bonne santé.
Est-ce que cela faisait de lui un monstre si ce néant moral permettait à ses frères et soeurs de vivre en harmonie? N'y avait-il rien de plus noble que le sacrifice de soi pour une cause plus grande? La distance avec ses pairs était réelle mais son âme ne pouvait se permettre de les abandonner. Il n’avait pas besoin d’aimer qui que ce soit pour ressentir de l’amour pour son peuple.
Le meurtre était son art, sa pratique menerait inéluctablement à sa maîtrise.
Daith’Tirith avait trouvé sa vocation, il était maintenant prêt à devenir un citoyen valeureux et respectable. Les ennemis d’Ilidelwis et de Lysaelle faisaient légion, sans quoi Ruvaen ne manquerait pas de cordes à pincer, ni de fil à siffler. Ferait-il le poid contre eux? Là n’était pas l’importance. Tout comme les marcheurs fantômes, sa fin demeurait inévitable.
Trépassé déjà, il avait surmonté l’effroi.
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Ruvaen Daith'Tirith
Messages : 52 Date d'inscription : 30/09/2020
Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Ven 9 Oct - 17:41
L'Allégorie du cercle
“Voyez notre monde à travers mes yeux, un univers si vaste qu’il demeure incommensurable. Incompréhensible, même pour nos plus hauts esprits, tout comme eux j'accomplis un devoir plus grand que mon humble existence. Et dans ma grande empathie, je n’en viens qu’à cette sombre conclusion:
Je ne ressens rien.
Des milliers de vies éteintes pendant que d’autres se battent afin de gagner leur tout premier souffle. Des êtres, valeureux et honorables ne virent jamais le visage de leur assaillant ni n’eurent rien ne ressemblant à un équitable procès. Ils furent abattus comme des animaux, conscients de leur fin qu’à la toute dernière seconde.
Je fais cela pour vous, pour nous, pour nous tous.
Lysaelle est la seule récolte au bout de cette moisson de folie. Nous ne sommes pas faits pour nous abattre entre nous puisque je réalise à ce jour que nous sommes les ficelles d’une même étoffe. Sans elle, que sommes-nous? Des assassins, sans foi ni loi, de purs agents du chaos, pourchassant notre monde d’un coin à l’autre pour trouver finalement que l’ennemi est au fond de nous.
Dar’Ethruna Nuhuinë, Roi des Ombres
- Les Marcheurs Fantômes”
Daith’Tirith retrouvait en songe ses passages favoris, tiré du livre qui infusait d’ivresse sa morne réalité. C'était ce même sourire latent qui attira le long bâton de bois qui mis sèchement fin à ses rêveries.
“Ruvaen, que voulait démontrer Ëalawë dans l’allégorie de la caverne ?”
Pris de court, il balbutia:
“Euh, que les gens sombre n’aiment pas les gens de lumière parce qu’ils … sont habitué au noir et que… le blanc les aveugle car … il ... ”
Le rire dissonant de ses camarades de classe s’éleva si haut qu’il s’écrasa promptement dans son banc de chêne. Cette pointe directe, infligée à son âme, était l’une de celle qui le blessait si grièvement au quotidien et répéter l’expérience lui semblait toujours plus terrible d’une fois à l’autre. Diminué et malaisé à la fois, le Daelwenas aux cheveux de jais rajouta le carmin à la palette de honte qui salissait ses joues.
Une énième punition indirecte, infligée par Eadil Emerwen, précèptrice et matronne invétérée d’Illidelwis. Satisfaite de son châtiment, elle donna aussitôt la chance à autrui de donner la bonne réponse.
“Ëalawë tente d’expliquer qu’afin d’ascendre au monde supérieur de l’intelligence, il faut premièrement souffrir la lumière de la vérité et habituer ses yeux à celle-ci. Ensuite, à avoir vécu toute sa vie dans l’ombre, elle devra se faire violence pour revenir à son ancienne vie parce qu’elle devra vivre avec le fait que ses andils, incapable de comprendre son expérience, préfére rester dans l’ombre de ce qu’elles connaissent.”
“En partie, uma, bien vu Hina! Il tente d’expliquer que la vérité ne se démontre pas entièrement par celle perçu par les sens. Que si elle est démontrée, qu’il faut y être conduit doucement, avec prudence, par les voies de l’esprit. La caverne symbolise le monde d’en bas et celui des sens, en d’autres terme: la terre. Le soleil quant à lui prend la forme de celui de l’intellect, supérieur par sa hauteur et sa lumière, permettant à l’un ou à l’une de suivre son chemin. Et quelle est la faute d’Ëalawë ici?”
Personne n’osa tremper le moindre orteil, de peur de subir les rires cruels de l’assemblée juvénile qu’avait subit le pauvre Daith’Tirith. Pourtant déjà trempé dans l’ombre de sa petitesse, Ruvaen eut la réponse dans sa tête sous la forme d’un songe spontané et la garda pour lui.
Lysaelle nous apprend que l’harmonie entre le ciel et la terre est nécessaire afin d’éviter que l’un ne l’emporte sur l’autre.
Une main bien droite s’éleva et Hina Elena répondit d’une voix empressée:
“Il a oublié les principes de Lysaelle !”
La préceptrice agita son doigt approbateur vers l’esprit le plus fin du grand cercle et ne pu réprimer un sourire empreint de fierté. La victoire de la jouvencelle fut assombrit toutefois par un commentaire lavé de tout scrupule, psalmodié par un grand blond au visage ensorcellant.
“Il a oublié les principes de Lysaelle!!!”
Exagéra t-il à la suite de sa mimique grossière de l’enthousiaste élève.
Le sourire mesquin d’Irima Nangwa, prince de la classe, appliquait sa signature sur la favorite. Il raclait sa souveraineté à son inébranlable confiance qui lui permettait une désinvolture si polarisante que même la préceptrice préférait ne pas le réprimander. Cela même si celui-ci minait ouvertement son autorité en élevant la voix sans main levée, elle savait qu’il valait mieux pour tous que le souverain au faciès sculpté puisse larguer son épineuse vision de la chose sans être interrompu.
Ruvaen contenait à peine son aversion pour lui.
À postiori, ses sujets roulaient leur yeux à la réponse formulée, infectant sa courte victoire de sa détestable moquerie. Irima canalisait la jalousie ainsi que l’envie collectivement éprouvé contre elle afin d’abaisser sa valeur sous les yeux de l’assemblée. Ce n’était pas la seule tare maligne qu’il collait sur Hina et jour après jour, dérobait sous ses pattes, les faveurs de son public. Il avait ainsi créé la “culture de l’idiot”, comme Daith’Tirith se plaisait à la nommer, qui consistait à paraître le plus niais possible afin de déclencher les rires et d’ainsi gagner son approbation. Cette entreprise leur procurait un abri contre les railleries du prince et ainsi moissonnaient une paix que beaucoup trouvèrent si peu payée.
En contraste avec le cercle, Hina préférait subir ses assauts verbaux et demeurer authentique plutôt que de l’empêcher de faire briller sa finesse d’esprit. Ruvaen admirait cette bravoure dont elle faisait preuve face à cette cohorte d’ignare et de lâche qui préféraient rester dans l’ombre de la caverne pour le modique prix de leur entière personnalité.
Puis, le rappel de leur implications eut tôt fait de gâter sa vision parfaite.
Elle avait si longuement trahit son bégin pour lui par cette flagrante encoche à ses fidèles principes qu’il en oubliait leur officielle relation. Jamais elle ne rétorquait à ses commentaires alors qu’il la savait capable de tailler verbalement tout adversaire assez courageux - ou téméraire - pour débattre avec elle. Et pourtant, Hina avait succombé à son charme, sans surprise, comme c’était le cas de toutes les filles nées sous Solicia.
De plus, personne ne se frottait à lui par peur d’avoir à répondre à ses parents, membres éminents du conseil des anciens. Ils étaient irréprochable de par leur langue affutée et leur impitoyable ingéniosité. Sans conteste, avaient-ils le talent de tirer leur épingle de toute situation à la pointe de leur mot et puisqu’en Ilidelwis, la parole était reine, ils avaient élevé un petit prince.
Pouvait-il en vouloir à Hina, né d’humble parents alors qu’elle faisait preuve chaque lune d’une intelligence stellaire? Il la connaissait bien, elle qui ferait tout pour améliorer sa situation, y compris essuyer les bavures du fils proéminent d’une famille dont le support elle aurait ardemment besoin dans le futur. Elle lui avait dit à plusieurs reprises que cela comptait pour elle plus que son amour propre.
Ruvaen soupçonnait là un mensonge dans l’effort de paraître pire qu’elle ne l’était. Il croyait plutôt qu’elle essuyait cette constante humiliation parce qu’elle ressentait de l’empathie pour l’enfant troublé qu’il était.
Sans conteste le plus finaud et narquois de l’assemblée, Irima naviguait blindé, sur le navire de sa popularité, bâti de deux bois dont il n’était ni le bûcheron, ni le charpentier: sa beauté et sa famille. Or, cela fit du grand Daelwenas, un être féroce et compétitif sur des aspects modique de sa vie, comme de paraître le plus intelligent de tous dans toutes les situations possibles.
Chez les oreilles acérées, l’or ne dictait pas qui était le plus fortuné mais la monnaie émotive produisait la même disparité.
Être capable de séduire était donc secrètement révéré et considéré comme l’ultime véhicule de pouvoir chez les jouvenceaux de la forêt. Nangwa avait compris cette notion très tôt et s’était déjà frayé un chemin sans merci à travers le coeur de la moitié des adolescentes d’Ilidelwis. C’était bruit courant d'ailleurs, qu’il revisitait de temps à autres ses vieilles conquêtes.
Ruvaen haïssait Nangwa de tout son être et pire encore, détestait cette intarissable envie de lui ressembler. C’était fréquent chez les jeunes Daelwenas: si toutes les filles le désirait, alors tous les garçons voulaient être comme lui.
“Ouuu là, me regarde pas comme ça, j’ai des frissons. Je vais peut-être subir le courroux des “gens de lumière”?”
Son sourire aiguisé ciselait à peine ses machoires parfaites qu’il l’avait déjà taillé en pièces. Sa pauvre rétorque avait pourtant fait mouche: la classe rugit d’un rire cacophonique qui perdura jusqu’à ce que la préceptrice du y mettre fin d’un haut-en-bas autoritaire de ses mains. C’était son sourire complice qui entailla le plus profondément le jeune Ruvaen, signe d’une blague qu’elle jugeait de bon esprit.
Même Hina eut l’ombre d’un rire avant de capter son heurt, confirmant à ses yeux qu’il aurait dû prendre la blague avec une pincée de sel.
Cependant, il ne pu s’empêcher de s’en prendre à lui-même, à son armure sociale si fragile ainsi qu’à son épée spirituelle émoussée, destinée à défendre son honneur. Il constata avec rancoeur qu’il était bien plus simple de prendre une défaite quand on soupait tous les soirs au banquet de la victoire. Cet énergumène sans foi ni loi le battait sous toutes ses coutures et c’était dans cet esprit de compétition maladive qu’il ruminait.
Puis l’assemblée fut rompu et Daith’Tirith libéré de ses tortionnaires. Le jeune vert se dirigeait, comme à l’accoutumée, vers les ombres calme et fraîche de son terrier. De là, il retrouverait le Roi des Ombres ainsi que les tumultueux mais victorieux Marcheurs Fantômes. Ce fut à ce moment qu’il sentit une main à son bras et fut plongé dans le regard étoilé d’Hina Elena.
“Tu sais, il est toujours comme ça. On peut pas changer sa nature, Lysaelle l’a voulu ainsi. Désolé pour son comportement cabotin, il …”
C’en fut trop.
Des années de sentiments refoulés lui coupèrent nette la parole et s’abattit sur elle comme une averse insoupçonnée.
“Pourquoi le défend tu sans cesse, Hina? Ce n’est qu’un bon à rien qui ne fait que t’humilier publiquement. En plus d’être rustre et malicieux, il se gausse comme un prince dans sa cour. Il dévalue notre entière évolution, de la noblesse au conseil des anciens en s’appropriant des gens pour les faire jouer comme ses bouffons royaux. En plus de galvauder ici et là … il est indigne de t’avoir … il … ne te mérite pas!”
Ce fut dit: à travers le brouillard de sa fulminante colère, une timidité avait brusquement trépassée et les cartes étaient maintenant échouées sur la table de la confrontation. Contre toute attente, cependant, cette soudaine tempête réveilla le déluge qui sommeillait en Elena.
“Et toi, tu me mérite? C’est ça ? À te vautrer dans tes histoires, ne laissant de place à personne dans ton coeur? Ça te ferait un grand bien de sortir de ta tête et de te faire quelques andils. Ce remou puéril est un signe que tu devrais respirer l’air autours de toi plutôt que de t’enfermer dans ta tanière!”
Proprement émasculé, comme seule elle savait le faire, le Daelwenas perdit son regard dans la pénombre de la honte. Sa rétorque fila comme une longue flèche et sa précision chirurgicale le rendit à la fois triste et furieux.
Proprement brandit, l’arc de la vérité est le plus létal de tous, au royaume de l’argument.
Il voulu hurler haut et fort qu’il lui était impossible de jouter contre le moindre cavalier, que cette incapacité de se défendre était née d’une aversion profonde de son être et d’une inflexibilité auto-destructrice après avoir si longtemps courtisé l’échec. Que son esprit était comme un placard encombré, qu’il était impossible de trouver le moindre argument lorsque le temps le demandait. Que ses histoires, si puériles semblait-elles, lui permettait d’apprendre la vie à travers leur trame narrative, chose que les leçons de langues et d’histoire n'achèvera jamais.
En somme, qu’il était un poisson parmis les oiseaux à qui on demandait d’apprendre à voler.
Mais ... rien de tout cela ne fit surface et tout ce qu’il trouva à bredouiller était:
“Tu sais bien que je ne sais pas comment parler… que je suis bête et lent, c’est difficile pour moi de …”
Elle leva une main impérieuse vers sa rétorque et ses yeux clos indiquèrent qu’elle ne voulait pas entendre ni même voir cette excuse. Hina inspira bruyamment et dans l’échec de dompter sa colère, ses fines épaules restèrent vivement contractées.
“ C’est peut-être un bon à rien mais lui n’est pas un lâche. Ce doit faire plus de la moitié d’un siècle que je t’écoute geindre à propos de ta situation alors qu’il est temps que tu sortes de cette torpeur. On a tous quelques chose qui nous entrave, Ruvaen, et si tu ne trouves pas un moyen de composer avec cela alors tu en auras des vies séculaires à ruminer ton échec.”
Daith’Tirith perçu immédiatement que le sermon proféré par son amie l’avait blessée elle autant que lui. Le sang bouillait dans ses veines et la fumée brouillait ardemment son esprit dans un cyclone de colère, de hargne et de honte qui dévorait son âme à grandes dents. Ses poings serrées était plus blanc que cette vérité et les larmes qu’il réprimait reluirent dans l’eau trouble de ses mires violaçées.
Rien, à ce moment, ne lui fit plus mal que de réaliser qu’il l’avait perdu depuis des lustres déjà, bien avant d’avoir fait cet irrémédiable aveux.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Mar 13 Oct - 21:26
Les sombres facettes de la lune
“ À la mort de l’aube, aucune lune n'émerge sans les larmes versées par le passage du crépuscule.”
- Le Roi des Ombres, les Marcheurs Fantômes
Condamné à regarder celle qu’il aimait filer avec celui qu’il détestait, Daith’Tirith s’évertua à creuser sa tanière encore plus profonde.
Dévalant la pente escarpée du forum extérieur, il se lança dans une course effreinée afin d’engourdir son esprit. Cette montée d’énergie ferma les portes de son intérieur pour mieux évaluer les dangers d’une telle cavale. Chaque obstacle, soit les arbres, ronces, butte ou racines, furent vaincu avec la témérité de l’abandon. C’était un échappatoire bienvenu à ce purgatoire dans lequel il macérait depuis sa tendre enfance, une aride prison qui encombrait sa réalité. Cela dit, la destination n’était pas importante ni le Daelwenas avait-il la moindre idée d'où elle menait.
Il existait tout de même une méthode dans tout ce désordre.
N’ayant aucune demeure distincte, le vert adolescent trouvait toujours une réplique parfaite de son sanctuaire que Hina Elena appelait son “terrier”. Le fait qu’il le creuse n’était qu’une métaphore mettant bien en lumière l’effet néfaste que signifiait ce refuge pour lui. Parce qu’il trouvait bien souvent - et ironiquement - asile au sommet des arbres les plus haut, cette appellation lui semblait tout à fait ridicule. Ainsi ne perdit-il pas de temps à se perdre dans l’éternelle forêt et trouver sa tour d’écorce.
Une fois aperçu, le Daelwenas procéda à son escalade avec la rudesse caractéristique à tous sauf son peuple. Perché sur l’une des branches du colosse, il s’affaissa contre le tronc et se laissa ainsi choir jusqu’à atterrir sur son séant. Loin de tous, des potentielles réprimandes ou escarmouches, il était enfin seul avec lui-même. Néanmoins, les mots d’Hina Elena vinrent gâcher cette paix, comme si elle avait glissé un fruit gâté dans son panier. Pour qui se prenait-elle dailleurs? Sa mère? L’eut-il mieux connu, il aurait pu contester cette idée avec plus d’ardeur. N’était-elle pas mademoiselle parfaite: vive d’esprit et industrieuse? Pourtant, à avoir la tête au ciel, elle avait une piètre vision terrestre et ses angles-morts étaient bien mal couvert.
Par exemple, ce vaurien contre qui elle s’appuyait afin de ne pas finir ses soirée toute seule avait réussi à bien l’aveugler. Et que dire de cette ambition d’un jour siéger au conseil alors qu’elle ne voyait pas l’assemblée pour ce qu’elle était vraiment. Aux yeux de Ruvaen, elle n’était autre qu’une noblesse actuelle dont la hiérarchie avait été remplacée par une autre. Il trouvait bien arrogant de croire que la société avait évoluée de siècle en siècle depuis la dissolution de leur caste élite. Elle était resté la même, simplement plus discrète et pernicieuse. Parfois, Ruvaen se demandait pourquoi il était le seul à voir la pourriture qui s'infiltrent par les fissures de leur sphères sociaux. Peut-être était-ce parce que le Daelwenas moyen était un amoureux de la beauté, préférant l’optimisme au réalisme pour la simple et bonne raison que la réalité était plus horrible que le mensonge?
Parfois il était difficile de croire qu’ils étaient de distant parents des infâme Nargolith.
C’était cette finesse, cette propension vers les vertues de l’art qui les reliait contre leur gré. Lui-même penchait vers le premier, favorisant inconsciemment l’approche artistique dans tous ce qui lui était possible d’entreprendre.
Ce besoin de faire mieux, de préserver, d’embellir alors que les choses autours de lui semblaient toujours finir en ruine, était ce qui les gardait en vie. C’était l’essence de l’équilibre, lui avait-on dit, que d’être ainsi poussé par l’instinct à garder intact ce qui ne le resterait pas et que c’était dans ce combat que gisait la réelle valeur des choses. Daith’Tirith refusait, cependant, de croire qu’il était une marionnette du destin et pestait contre toute mention du contraire. Borné qu’il était, le jeune Daelwenas préférait croire qu’ici-bas, l'on façonnait son propre chemin.
Peut-être était-ce la lune sous laquelle il naquit qui lui permettait de reconnaître le sournois? L’idée douloureuse impliquait tristement qu’il savait renifler les siens. Certes, dans l’entreprise de se préserver, Daith’Tirith avait bel et bien appris l’art de la supercherie. Dans son quotidien, il apprit à camoufler ses états d’âmes, abrutir ses conversations et embellir ses histoires. En effet, le jouvenceau savait qu’inviter ses pairs dans ses réelles pensées auraient tôt fait de les faire fuir. De même, cette vaste capacité à revisiter son âme faisait de lui quelqu’un de menaçant pour les adolescents normaux d’Illidelwis. Enfin, puisque ses soirées ne se résumaient uniquement qu’à la torture de son âme, le besoin d’inventer de faux exploits devint crucial s’il voulait garder une quelconque pertinence aux yeux de tous.
Était-il donc comme eux, au final?
Cette pensée fut ensevelit sous le zêle de ses efforts désespérés, incapable de vivre avec une telle réalité. Elle le subjecta malgré lui à l’aride réalité autours de lui et d’un seul coup, il entendit de nouveau. Les oiseaux chantant, les branches qui craquait et le poid infime d’une douce brise qui caressait sa peau pour la première fois aujourd’hui. Cet exercice de méditation l’ancra dans le monde réel avec une telle intensité que tout autours de lui semblait lui communiquer leur présence. Ses sens s’en voyèrent décuplés et parmis eux, ses fines oreilles captèrent une conversation qui approchait faiblement de son hêtre.
Aussitôt, comme s’il s’agissait de sa seconde nature, le Daelwenas aux mires violaçées parcouru la longue branche sans le moindre craquement. D’une à l’autre, il dévala en silence son arbre jusqu’à ce qu’il soit à portée de vue du duo.
Irima et Hina.
Quelle chance s’eut-il dit, à priori, prenant le ton du sarcasme qui le caractérisait si bien. La vue de leur allégrèsse, côte à côte, nouait son estomac à un point tel qu’il combattit immédiatement l’envie d’hurler pour les faire fuir. Sa curiosité gagna pourtant le combat et l’invisible aux oreilles effilées demeura muet devant leur arrivée.
Quelques chose au fond de lui l’empêchait de partir.
“Je ne sais pas ce que je ferai en sortant de l’académie, si j’irai chez les protecteurs ou les rôdeurs. Je ne sais pas Hina.”
Il semblait contrarié.
“Tu devrais le savoir, pourtant. Tes parents s’en moque peut-être mais moi je n’épouserai pas un raté, tu le sais bien. Allez, prend ma main.”
La question semblait avoir mis le désordre dans les idées de Nangwa et à mesure qu’il marchait devant elle, Ruvaen voyait bien qu’elle l’avait fait exprès. C’était peu commun pour lui de la voir ainsi détendue aux côtés de quelqu’un. Lorsqu’il se remémorait leur promenade, il revoyait les discordants dialogues où la concernée faisait tout pour le convaincre du bien fondé de ses idées au détriment des siennes. L’adolescent vert ne se rappelait pas les sujets débattus mais la désespération dans les yeux d’Hina elle, demeurait vivide.
Elena le taquinait, menant la danse verbale avec une espièglerie déconcertante. Lorsque la jouvencelle aux cheveux d’automne en eut assez de jouer avec lui, elle s’appuya dos contre l’arbre et dirigea ses prunelles chargées vers lui.
Irima dissipa ce nuage d’hébétude en voyant l’opportunité qu’elle lui communiquait. Confiant de connaître là où menait cette intrigue, il s’appuya contre le hêtre d’une main désinvolte et de l’autre, pressa une caresse sur le doublet de son amante. Elle chassa sa main d’une tappe caractéristique à la maîtresse d’école qui reprend son élève et le gredin fit mine d’une moue. Suivant cet échange silencieux, il renchérit et elle ne l’arrêta pas cette fois. Lorsqu’il s’embrassèrent, Ruvaen découvrit avec horreur l’heureuse chimie qu’ils partageaient. Elena ne s’était pas trompé en prenant pour amant Irima Nangwa.
Elle avait choisit à merveille.
Il décrypta aussitôt leur dynamique et pourquoi elle l’avait préféré à lui. Hina Elena avait la main haute sur Irima Nangwa, comme l’avait une mère oedipienne sur son insoupçonné rejeton et ainsi pouvait laisser exprimer son côté disciplinaire. En retour, elle le laissait la malmener devant tous, lui permettant de préserver son monstrueux égo ainsi que la main mise sur ses camarades. Jamais aurait-elle été capable d’une telle maîtrise sur lui car avouons le, comment efficacement mettre un harnais sur une infatigable tempête? Tout de même, une vive tristesse s’empara de son coeur brisé et le jouvenceau aux oreilles acérées ne resta pas pour la suite. Sur le chemin du retour, un passage du roi des ombres lui revint alors:
“ À la mort de l’aube, aucune lune n'émerge sans les larmes versées par le passage du crépuscule.”
Le Daelwenas comprit enfin ce que Dar’Ethruna cherchait à enseigner à ses marcheurs lorsqu’il leur révéla qu’il pleurait chaque mort avant le lever de chaque journée.
Il n’y a pas de croissance sans la souffrance qu’elle amène.
En ce jour, Ruvaen avait souffert et demain, il n’aurait plus aucune larme à verser pour Hina Elena.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Jeu 22 Oct - 19:26
La malédiction de Nasticia
“Je sais que je ne suis que l’ombre de moi-même mais ce soir, je tomberai sur votre humanité comme un aigle sur un rongeur et ce n’est qu’après ce maigre repas que mon coeur sera repu.”
“Lorsque je regarde le ciel, je ressens encore sa présence piégée dans ma poitrine. Tout comme mes larmes, les étoiles miroitent son étincelante mémoire. C’est elle qui m’éclaire sur le chemin esseulé, à travers les cercles interminable des enfers abyssaux de la nuit.
“Une nouvelle ère se lève et les héros des temps anciens doivent partir. Ça je l’ai compris depuis des années. Ne vous méprenez pas, je combattrai jusqu’à mon dernier souffle contre le mal de tout temps. Je serai le rempart contre l’invasion latente des abysses et tiendrai bon jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de mon âme.”
Nwalya ehtelë
“Souffrez dignement”
Le Roi des Ombres avant de connaître sa fin aux mains larmoyantes de ses fidèles.
L’aube s’était levée et la dernière journée à l’académie battait son plein. Des années s’étaient écoulées depuis et chacun avait choisit la branche sociétaire qui lui convenait le mieux. Irima arborait son sourire étincelant sous l’étendard de la garde sylvestre alors qu’Hina avait rejoint le cercle restreint de l’Ordre Ovalique. Ruvaen quant à lui avait été assigné aux bergers puisqu’à leur yeux, n’était capable que de cela.
Bien qu’on lui répétait sans cesse qu’il n’y avait aucune honte à vivre simplement, Ruvaen savait qu’il était capable de bien plus. De plus, qui mieux que l’esseulé pour connaître les recoins les plus secrets de la forêt éternelle? Son faciès aux mires tristes n’inspirait cependant aucune autorité alors son application pour la garde sylvestre avait été révoquée avant même d’être, ne serait-ce qu’un tant soit peu, considérée. Rien de plus émasculant que de se voir ainsi considéré comme du bétail alors qu’il avait la volonté et la ténacité du chasseur. Nonobstant, cette notion lui était présentement inconnue puisqu’il ne l’avait pas encore totalement comprise.
Elle s’éclaircit un jour alors qu’il revenait d’une abondante cueillette de chanterelles et fut surpris par un trio de gardiens qui patrouillait le secteur.
L’un d’entre eux ne fit pas attention à lui, ne s’écartant même pas d’un iota alors qu’il marchait tête baissée. Son bras heurta le panier qui rendit son savoureux contenu sur le sol. Ruvaen n’eut même pas le temps de s’abaisser pour les ramasser que les gardiens avaient déjà mis leur bottes terreuses sur les pauvres champignons qui jonchait l’herbe autours de lui.
“Fait attention, mavar, j’aurais pu te méprendre pour un Gorlak tant tu est gauche.”
Dans une société où l’égalité était sacrée sous le regard de Lysaelle, les gardiens sylvestres avaient toujours l’art de lui rappeler sa place au sein de la forêt. Mavar, signifie simplement “berger” le marquant au fer rouge alors qu’il connaissait pourtant son nom. Irima adorait ignorer ce fait publiquement, tout simplement parce qu’il savait qu’au sens propre, son rang le plaçait au dessus de Ruvaen. C’était ainsi pour beaucoup de Daelwenas, surtout chez les hommes, de vouloir prouver leur valeur en dévalorisant celle des autres. Daith’Tirith en avait longuement souffert mais n’étant plus adolescent, il comprenait bien que sans cette constante compétition, l’esprit des êtres de la forêt devenaient vite émoussé.
Le jeune Daelwenas ne condamnait plus cette approche mais acceptait simplement qu’il était mauvais à ce jeu.
Ramassant champignons et dignité, Ruvaen sentit la colère approcher le point d’ébullition mais se contenta plutôt d’arborer un sourire forcé à son endroit. Les trois gardiens se mirent d’accord sur l’arbre qui leur servirait d’avant-poste et une fois celui-ci escaladé, échangèrent quelques blagues à ses dépends. Ce qu’il pouvait les détester, ces maudit gardiens, du haut de leur perchoir alors qu’ils s’accordaient une injuste importance par rapport aux citoyens d’Illidelwis. Leur arguments n’étaient proférés qu’en secret car l’organisation sociétaire ne tolérait pas ce genre d’injustice. Celui qui stipulait que sans eux, la société entière n’existerait plus. Il marquait tout de même un point et c’est bien ce qui l'encolérait encore plus.
Leur vision acuitée était ce qui les distinguait des autres Daelwenas et ce qui marquait leur entrée dans l’organisation.
Toutefois, à tarabuster le pauvre berger, les trois gardiens sylvestres n’avaient pas aperçu l’incursion d’une dizaine de Gorlak qui menaçait leur arrières. Un cri de surprise de la part du berger les alerta et avant même de pouvoir se retourner, l’un d’entre eux reçu plus de flèches qu’il n’en fallait pour l’abattre. Le gardien assassiné s’affaissa contre le chêne, puis la branche, pour ensuite s’échouer en silence sur l’herbe.
Les deux gardiens survivant firent face aux Gorlak qui vociféraient leur satisfaction avec une envahissante aggressivité. Leur seule chance de survivre était de descendre de leur perchoir et de les attirer dans l’épais boisé. De là, les gardiens sylvestre savaient comment utiliser la forêt éternelle à leur avantage, ce qui n’était pas le cas des brutes à la peau verdâtre. Si bien manoeuvré et par ce fait, un Daelwenas en forêt valait bien cinq Gorlak à pieds. Lorsqu’ils s’abandonnèrent à leur charge meurtrière, le régiment de colosse firent trembler le sol sous leur pieds. Irima ainsi que son compatriote dégainèrent leur lames courtes, un choix judicieux contre les lames longues et les haches de leur attaquants. Ils réceptionnèrent l’avancée avec brio et se battirent avec une fluide férocité, usant de leur vitesse pour absorber la première vague. Cependant, leur retraite était coupée, piégée par trois archers embusqués qui lâchait des pluies de flèches sur eux depuis maintenant un bon moment.
S’ils continuaient de se battre ainsi à découvert, leur temps était compté.
Sans eux, Illidelwis serait en proie à un raid surprise. Nul doute que les multicentenaires viendraient à bout de l’audacieuse bande mais à quel prix? Une telle attaque promettait la mort de beaucoup avant que la garnison ne s’arme et ne se mobilise. Le mavar se devait d’agir, amassant une poignée de chanterelles et fusilla les embusqueurs d’une véritable volée de champignons. L’un d’eux reçu même un panier en sa direction, ce qui réussi à déranger leur concentration, mettant fin à leur tirs. Pris ainsi au dépourvu par l’attaque improvisée, les Gorlaks hurlèrent sauvagement avant de tirer leurs interminables épées et de foncer avec résolution vers le berger.
Devant une telle menace armée, Ruvaen sentit la peur nouer son estomac et dévala rapidement la pente derrière lui, esquivant ronces et lianes afin de ne pas être mis en pièces. Malgré l’urgence de sa course, ses aggresseurs doublèrent sa force et sa vitesse. En résultat, ils le rattrapèrent en un rien de temps et avant qu’il ne puisse pousser un cri, l’un d’eux saisit brutalement son bras afin de l’immobiliser. Son épée levée, il hurla son triomphe alors qu’il abattit sa lame dans l’écorce d’une immense racine qui produisait une arche fortuite au dessus de leur tête. La réponse enragée de son assaillant fut rapide et son poing l’envoya valser plus loin. Sonné par la frappe mais libéré de la poigne, le Daelwenas tituba un instant avant de remarquer que les autres auraient tôt fait de le rattraper eux aussi. Par chance, le plus grand des Gorlaks trébucha violemment sur une ronce et un craquement vérace résonna dans les oreilles acérée du berger.
Dépassant son compatriote qui braillait à déloger sa lame de l’arche, le dernier attaquant s’immobilisa puis saisit l’une des flèches qui gisait entre ses crocs et banda un immense arc composite en sa direction
Les yeux écarquillés de Ruvaen comprirent aussitôt le danger de rester dans la mire d’une telle arme. Sa course repris de plus bel mais cette fois, en direction d’une clairière bien dégagée, totalement à découvert. Il supplia la grâce de Lysaelle avant de s’y aventurer avec plus de jambes qu’il n’en avait jamais eu. Son instinct s’assura de guider ses pas à la manière d’un serpent: agile et tortueux. Le stratagème fut un succès et les flèches sifflèrent leur vent de mort à quelques pouce de ses membres effreinés. Ses vert assaillant n’abandonnèrent pas et le pourchassèrent des kilomètres plus loin jusqu’à ce qu’il disparaisse totalement de leur vue. Ruvaen n’était peut-être pas un combattant mais sa connaissance des recoins les plus sombres de la forêt lui sauva la vie ce jour là.
Une fois la nuit tombée, les Gorlaks maintenant perdu et épuisés, ne survivrait pas longtemps sans eau ni nourriture.
Il aurait pu les laisser périr ainsi, s’extirper de leur présence et ne plus jamais y repenser mais quelques chose en lui s’éveilla. C’était plus fort que lui, sous toutes les lunes qui brillaient au dessus de l’immense forêt, une insatiable envie de tourmenter ses tourmenteurs serpenta son esprit. Les idées vengeresse germèrent en son esprit et se multiplièrent comme un millier de nécrophage sur le cadavre d’un rat. Se glissant parmis l’épaisse végétation, il pista les Gorlak sans difficulté. Il les trouva aisément à l’odeur de fumée et au crépitement de leur feu de camp.
Immobile, il les observa longuement.
Parmis le fumet de sueur et de crasse, de fumée et de bois humide, une fragrance particulière se distingua du lot.
La peur.
En effet, évincé de leur régiment et abandonné dans l’ombre et l’inconnu, les Gorlak ne semblaient plus que de vulgaire bambins effrayés. Chaque son, chaque bruissement ou hululement imité par le Daelwenas, était l’équivalent d’un poignard crénelé entre les omoplates de leur âme. Il n’était que deux à présent puisque la mort du troisième fut déduite par son absence. Ruvaen aurait pu en jurer par sa chute, par le bruit distinct d’une nuque proprement rompue. Une étrange résolution cimentait la volonté du Daelwenas, écrasant toute peur qu’il avait ressentit lors de leur précédente incartade. À présent, les rôles étaient inversés, les chasseurs étaient maintenant devenu les proies. Le jour, Ruvaen ne pouvait se mesurer à leur immense force physique ainsi qu’à leur grande prouesse martiale. Sous Nasticia, par contre, nulle armure ne les protégerait de ses coups.
S’il savait manier un instrument de mort, c’était bien celui de la peur.
Le vert tortionnaire cessa de les tourmenter pendant un long moment, observant ses victimes s’épuiser à ne pas fermer l’oeil. Lorsqu’ils abaissaient leur garde, il renchérit en agitant vivement les buissons voisins en passant rapidement au travers de ceux-ci. L’un d’entre eux perdit toute prudence et hurla sa démence, affolé par l’ennemi invisible qui émiettait petit à petit son esprit. Sa ruée vers la noirceur ne lui servit à vaincre d’autre ennemis que l’air ambiant. L’autre resta immobile devant la flamme qui mourrait peu à peu, paralysé par l’horrible image d’être engloutit par les ombres de la nuit.
Ruvaen se tint prêt.
L’affolé arriva près de lui qui, accroupit alors, lui servit un habile croche-pied. Une fois au sol et hébété par une traître chute, le Gorlak fut assaillit par le Daelwenas. Une ombre deux fois moin grande que lui mais mille fois exagérée par l’horreur qui dévorait son esprit, il fut sauvagé sans grâce à coup de serpe. Certes puisque Daith’Tirith n’avait d’arme sur lui que l’outil ayant servit à la cueillette des chanterelles. Le colosse effrayé perçait la nuit d’un terrible cri, le mariage entre frayeur et douleur confirma à son compagnon que le pauvre ayant bravé les ombres était entrain de mourir déchiqueté par une horrible créature.
Lorsque Ruvaen en eu terminé, il retrouva son compatriote au sol, mort comme les cendres devant lui, la main au coeur et le visage tordu par l’effroi.
Ne venait-il pas, lui un simple mavar, de protéger les protecteurs de la forêt? S’il suivait la logique d’Irima Nangwe, sans lui, il n’y aurait plus de rempart pour le rempart. Mais qui allait-il rallier avec ce raisonnement de toute façon? Il connaissait déjà celui des gardiens qu’il venait de tirer d’affaire. Ruvaen avait fuit devant la menace Gorlak en laissant les gardiens sylvestre faire tout le travail. Pour eux, il était et resterait à tout jamais un couard de berger.
Là était son fardeau: qui d’ombre naquis restera dans l’ombre à jamais.
Là était la malédiction d’être né sous Nasticia.
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Dernière édition par Ruvaen Daith'Tirith le Mer 18 Nov - 14:52, édité 1 fois
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Jeu 12 Nov - 18:50
Vivant malgré lui
“Âme moissonnée ravivant la nôtre, En peine maintenant, elle implore En dépit d’être décharnée, Puisqu’aux sens elle amène la mort, Maudit dorénavant, nous prêtons tout de même oreille, Au son de ce clocher, Qui déclare la guerre une fois de plus, Aux tréfonds obscurs de l’humanité.”
- Ode à la saison des abysses
Depuis l’avènement de l’âge adulte, Ruvaen avait côtoyé la mort sous un nombre effroyable de masques. Berger alors, on l’avait lancé dans un purgatoire plus solitaire encore, puisqu’il n’y avait de meilleur assassin à l’homme pragmatique que l’ennui. Décidé, le jouvenceau jura par la force des choses qu’il n’allait pas servir à cueillir le fruit de son propre trépas, même s’il s’agissait de faire vivre les siens. Il s’enfuit donc loin d’Ilidelwis vers Val’Arak, là où sa pensée première était de rejoindre les autres enfants de Lysaelle, en quête d’une seconde chance.
Cependant, Ruvaen Daith’Tirith n’était personne.
Ses vivres n'étaient que la récolte d’aujourd’hui sinon cette foi sans borne pour l’humanité, soit toute forme de vie humanoïde possédant une conscience. Si cette flamme qui brûlait en ses tripes n’étaient révélée au grand jour par un ours affamé, le jeune daelwenas avait espoir qu’au delà de cette fin sordide, il renaîtrait. Était-ce un bon temps pour orchestrer une fuite? Il ne le savait pas, car ni de l’espoir ni de la foi ne tiraient sa force du royaume de l’intelligence. C’est alors qu’il franchit les frontières, les dangers et les tréfonds de la forêt éternelle, loin d’Ilidelwis, là où sa place était mais n’est plus.
Qui aurait cru que - certainement pas lui - au même moment, au courant de la saison des abysses, les Daelwenas allaient partager son itinérance?
Après plusieurs jours de marche, ses pas l'avaient mené aux abords d’une montagne, au pied duquel s’allongeait une forêt naine. Ne sachant plus où il était, ses seuls compagnons étant la faim et le froid, Ruvaen savait que cette journée serait sa dernière. Un sourire tailla ses lippes entaillées puisque pour lui, cette mort était la sienne. Il avait pris le contrôle de sa vie et avait bravé la peur amenée par la souffrance. “Nwalya ehtelë” répéta t-il, qui lui rappelait de “souffrir dignement” jusqu’à son inévitable fin. Le mort-vivant tira les dernières noix qu’il avait conservé pour ce moment et décida qu’il trépasserait dans les bras de ses héros, là où sa vie - sa réelle vie - avait vue continuité.
Au sommet d’un arbre, devant les pages des “Marcheurs Fantômes”.
Emmitouflé dans sa cape, ses mains tremblantes brûlait les pages de son vieil ouvrage. À mesure que le temps le tuait à petit feu, ses paupières s’alourdirent et acceptèrent peu à peu les ébauches de ce sommeil éternel.
Un sommeil auquel il n’eut pas droit.
C’est au son d’une voix incertaine qui l'appelait, familière elle n’était guère mais fut suffisante pour le tirer des griffes gelées du trépas. Une petite daelwenas au regard inquiet et aux genoux fléchis le surplombait tout en secouant son épaule endolorie. À priori, la confusion surréelle le submergeait et sa mémoire lui fit faux bond. Cependant, cette douleur à l’épaule et le cadavre ouvert de son ouvrage centenaire prouvèrent qu’il était simplement tombé de son perchoir.
Celyëwen de son nom, su ouvrir les mires du jeune Ruvaen sur leur présente situation. Ne serait-ce que l’état actuel de la capitale ainsi que la décision du Sinwë de fermer ses portes. Daith’Tirith vit tout de suite qu’elle portait le fardeau des siens malgré elle et l’envie fiévreuse d’alléger cette charge fut immédiate. Il fut présenté alors aux autres membres du camp, entre autre à Faen le tombeur, Kéan le blagueur hors-pair, Elan’iel le franc-tireur, Arerindel qui parle plus vite que son ombre ainsi que bien d’autres, comme Atatolix, Piccolix et Bixi le guerrier-soleil.
Cela ne prit guère de temps avant que le novice soit testé au tir à l’arc sous la supervision d’Elan’iel. Bientôt, les intuables nébulix l'emmenèrent à traquer le thérathan, le démon, le dragon ainsi que les horribles trolls fantômes. Une incroyable série d'aventures avait contribué à faire croître le jeune daelwena qui maintenant avait trouvé une place où son utilité n’était pas remise en question.
Néanmoin, cette faim pour l’éternelle chasse, pour la traque de cible encore plus extraordinaire siégeait comme reine au cœur de son être. Les dragons du Yo’kai se révélèrent donc une proie exemplaire et Carbonne, un adversaire de taille qui saura amener satiété à cette avancée sur croissante et abyssale du vide de son âme. Encore aujourd’hui, rien n’allait l’arrêter dans sa quête si ce n’était que le trépas lui-même.
Et ne venait-il pas de le tromper une fois de plus?
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Sam 14 Nov - 5:09
Requiem à l’astre solaire
“Le vigile ne tue pas pour indulger la haine qu’il voue à ce qui s’étend devant mais pour défendre l’amour qu’il porte à ce qu’il a laissé derrière.”
- Ruvaen Daith’Tirith
Parfois, il ne suffit pas d’un grand événement pour marquer l’esprit d’une jeunesse. Parfois, il ne suffit que d’une pensée, d'une réflexion ou encore d'un regard sur l’avenir. Dans le cas de Ruvaen, ce fut au fil d’une lame, au prix du carmin de son sang.
“Souffrez dignement” qu’ils disaient.
Sifflant ce serment sous ses dents serrées, sous l’éclat clair-obscur de cette sournoise et détestée Nasticia.
Pour le vigile, chaque lune s’avérait cruciale car elle pouvait être la dernière. Certains priait la révérée Lysaelle pour être épargnés de son courroux mais pas Ruvaen, pas ce soir. C’était donc au chant répété de la vigie du campement qu’il souhaitait secrètement rencontrer son trépas. Pour lui, aucune traque n’était bénigne, aucun mal n’était infime car chacun d’entre eux était une autre négoce avec la mort. Les abysses étaient toujours à une éclipse de l’engloutir. Certes, né sous Nasticia, sa survie était dû à la finesse et la discrétion, à ses mots rangées dans leur fourreaux qui constituaient là le plus grand de son arsenal. D’un naturel allergique à la confrontation, c’était ainsi qu’elle l’avait influencé et à chaque rencontre de ses cousins blafards que cette balafre qui tachait son cœur larmoyait à nouveau. On lui avait demandé plusieurs fois: pourquoi les haïssait-il autant?
Il les haïssait parce qu’ils partageaient plus d’affinité avec lui que de différence.
N’y avait-il plus vaste tare, plus grande insulte à l’honneur que de ressembler à l’ennemi? Aujourd’hui, il était parti seul lors de l’appel aux armes de la garde sylvestre. Qu’un simple Gorlak avait foulé les terres de Val’Arak mais qu’importait pour Ruvaen car il ne lui en fallait qu’un seul. Qu’un qui soit plus malin que lui, plus fort et plus endurant. Si seulement … Le dur daelwena refusait malgré cela d’être une cible assise et ce fut dans l’ombre de la forêt éternelle qu’il espérait. À son retour, comme le fruit de sa mission, le vide était là: au beau milieu de son taudis, qu’aucune herbe ni alcool n'arriva à enterrer. Les tentacules décharnées de sa conscience s’abattait sans pitié sur son esprit, pris au piège au coeur de ce purgatoire au parfum de l’abandon.
Malgré cette lente agonie, Nasticia n'était pas éternelle. Tout comme lui, elle mourrait encore cette nuit et tout comme lui, elle se lèvera encore demain.
Au milieu de cette danse funeste, s’élevait un requiem à l’astre solaire.
Silencieux, il prit la direction de l’échoppe de Piccolix, là où il lui avait donné rendez-vous. Sa demande, camouflée sous le simple attrait, avait sa signifiance bien au-delà de la duplicité. Il implorait un symbole, une différence saillante avec ses ennemis jurés, ciselée à même le derme de son visage. Encore, c’était une autre parjure, une estocade venimeuse à sa génitrice d’albâtre pour qui sa haine brûlait encore d’une flamme incandescente. Il fit promesse à cette souffrance éphémère d’être digne de porter son flambeau, une fois encore.
Lorsqu’il eut terminé, ses doigts effleuraient cette nouvelle entaille, cette croix qu’il portait désormais avec résolution. Un renouveau signé au nom de la lame et du sang, un rappel de son appartenance à l’astre du matin, à la première flamme. Celle qui brûlera éternellement au cœur même des ombres les plus profondes.
Cette douleur lui amena clarté: Ruvaen savait maintenant l’avancée des abysses inévitable, c’est pourquoi il n'était plus son chasseur mais son vigile. Si ont ne pouvait l’arrêter, alors il surveillerait de près son avancée. À cette réalisation, il avait réussi à les chasser de son cœur.
Pour l’instant.
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Lun 16 Nov - 4:39
Que le feu parcours l’acier
"Résurgence, une vie creuse, Un autre trépassé, Chargé d’âmes monstrueuses, Faites place aux soldats consumés par la terre, Sacrifiés, unifiés par le feu de la guerre Marchant au serment du petit bois, Au nom de l’astre tout haut, Puisqu’à ses yeux, ils brûlent tous égaux”
- Ode à l'été de la première flamme
L’aube n’avait été favorable pour le vigile Ruvaen. La douleur à son front transcendait la croix gravée au fil d’une lame. Son mal crânien marchait main dans la main avec sa misère matinale et depuis plusieurs semaines, elle avait un nom: Carbonne. La densité de cette menace pesait sur sa psychée et l’attitude “au gré du vent” de la majorité de ses confrères et consœurs menaçait d’étrangler la dernière terminaison nerveuse encore en bon état qu’il possédait.
Parfois, Ruvaen n’avait rien d’un daelwena: impatient, intempestif et scrupuleux, il rageait au rythme d’un maelstrom emportant tout sur son passage.
Sa première victime était une consoeur, l’une de celle qui avait pourtant à cœur l’intérêt commun du campement. Accusant le devin de l’ordre ovalique de s’appuyer à outrance sur sa foi, en scandant l’aisée rhétorique de “Lysaelle nous protégera”. Cela ne fit rien pour calmer la tempête qui menaçait le jeune vert à abandonner toute raison à la témérité. Peu importait le feu qu’il envoyait, ses paroles lui sonnaient toujours aussi creuses.
Des actions, c’est ça dont il avait besoin.
L’âme lourde, son requiem pour l’astre solaire semblait cette fois muet. Sans espoir, il ne flanchait tout de même pas. Ironiquement, c’était cette foi en son expérience passée qui le gardait unifié avec lui-même. Combien de temps allait durer ce piètre adhésif cependant? Ça, seule Lysaelle le savait et encore … Ces temps-ci, même mère nature ne semblait en avoir la réponse. Assis aux côtés du devin qui avait réussi à le contenir, il purgeait sa peine en silence lorsque de nul part surgit moult cavaliers. Ces chevaucheurs tonnèrent de chants et d’allégories, combattant le vide à la flamme de leur passion. Guerriers et guerrières Nalkiris envahirent aussitôt les lieux et dès leur pied à terre, était porteur d’un glorieux message. Autant de belles femmes au charme sauvage attirèrent aussitôt l'œil scarifié du jeune vigile et fit sortir Faen de sa cachette. Un dénommé Trohr menait la troupe vers une chasse digne d’une légende: il s’agissait du majestueux et interdit daim blanc. Naturellement, les enfants de Solicia étaient chaudement invités.
Celyëwen refusa calmement l’invitation pour rester derrière avec un Nalkiris partageant son pacifisme tandis que Faen et Aradwal s'enquièrent aussitôt de leur équipements.
Ruvaen était résolu, il s’agissait là d’un signe de mère nature: une renaissance par le feu et l’acier par delà la plus ancienne des traditions: celle de l’éternelle chasse. Aussitôt, il éperonnait son fidèle et sombre destrier et suivit les guerrières de Lysaelle dans cette galvanisante aventure. Aussitôt furent-il près de l’endroit ciblé que leur montures étaient nourries puis attachées. Cette précaution complétée, les chasseurs consumèrent aussitôt les sentiers tortueux de la forêt éternelle. Ronces, racines, arbres et arbrisseaux semblèrent s’évincer devant leur avancée, les animaux, silencieux.
Ils savaient.
Nul n’échangèrent mots dans l’immersion totale de cette quête et aussitôt le campement des chasseurs établi, ils débutèrent leur traque. Les sens du chasseur daelwena étaient unifiés dans le sacrifice de son esprit: ses doigts ressentaient la terre humide, ses nasaux guidaient sa vision et ses mires perçaient l’horizon devant lui. Les traces du daim blanc semblèrent irréelles, d’immenses sabots à la forme impossible suivait un tracé chatoyant et magique. Une légion de minuscule feu follets voletaient dans sa direction, comme attirés par autant de force magique. Les lanceuses de sorts Nalkiris prouvaient cette présence mystique puisqu’à voir leur mires, elles partagaient cette même lueur. Le silence était complet, aucun son ne polluait cette majesté.
Une halte était appelée, un poing levé et fermé signait la trouvaille de leur proie.
Une immense bête au manteau céleste reluisait devant tous, défiant autant de chasseurs à son panache incandescent. Ses prunelles étaient noir comme une nuit mille fois étoilées et autant de feu scintillant dansèrent autours de ses sabots d’azur. À chaque raclée de terre, l’être cosmique renâclait une ensorcelante brume enchantée. Comme si la bête elle-même connaissait son destin, elle hennit avec tant de puissance qu’elle résonna à travers les landes. Nullement intimidé, Trohr, arborant comme unique vêtement une tête de cerf blanche, hurla et lança sa gigantesque stature contre la bête. Abaissant son monstrueux panache, le grand cerf anticipait sa charge avec une tranquille férocité. Le brave fut mordu par la violence des bois du daim blanc et projetté à des lieux de ses flancs.
Le silence s’abattit sur la troupe sans chef, derechef.
Il fut rompu par la guerrière Amalys, qui fit tonnerre de sa voix et fracassa les chaînes invisibles de la troupe paralysée. Bientôt l’écho résonna à chacun des enfants de Lysaelle et un après l’autre répétèrent le chant de la bataille. Les Daelwenas dardèrent la scène à leur tour, Aradwal en forme féline ainsi que Faen non loin de là. Ruvaen coursait entre ronces et rondins afin de trouver une ouverture entre les élémentaux de feu et de cristal qui ragèrent contre la majestueuse créature. Rien ne se tint entre la bête et sa charge: cristal comme feu furent sitôt pulvérisés qu’un autre prit sa place. Les flèches se multiplièrent sur la bête qui portait ses nouvelles épines cramoisies avec une furieuse résolution. Les guerriers suivirent la bête avec difficulté et s’échangèrent sa dissonante charge au son de leur pavois fracassés.
Les chasseurs resserrèrent leur formation, reprenant un souffle commun.
En réponse à ce bref cesser le feu, le légendaire daim blanc hennit mais cette fois, sa voix avait une triste et résignée mélodie. Leur silence tirait à sa fin: créatures et animaux de la forêt accoururent en grand nombre pour se battre aux côtés de la majesté du grand cerf. Ruvaen ainsi que les Nalkiris étaient pris en souricière lorsqu’ils constatèrent que là n’était pas la fin de leur adversité.
D’immenses dragonneaux de la forêt volèrent en cercle autour d’eux, rugissant leur indignation devant l'agression portée à l’esprit sylvestre. Leur temps était compté, leur destin scellé alors les pavois s’épaulèrent, les élémentaux se conjurèrent en succession et les arcs firent s’abattre volées après volées. Malgré leur état et leur sous-nombre, le cœur des Nalkiris ne flanchait pas et avec une archère ne quittant pas ses côtés, Ruvaen vit le sien revivifié à son tour. Ses mires violacées percèrent avec autant de flèches et sa vitesse de course lui semblait tout aussi irréelle. Sa cadence épousait celle de la grande créature, à mi-chemin entre le temps et l’espace. À un certain point, il lui sembla même partager la dimension du grand daim blanc puisque ce dernier cessa nette son avancée et vérouilla son regard dans le sien. Pendant une seconde qui sembla durer une éternité, Daith’Tirith cru voir miroiter son âme à travers les mires polarisants de l’engeance mythique. Ses sabots tonnèrent et balayèrent un épais nuage de poussière scintillante avant de se lancer contre le verdâtre archer. À ce moment précis, le temps s’arrêta, il n’y eut plus que le rôdeur et sa proie. Aucune hésitation, aucun remord ni regret, même face à tant de tangible férocité. Tout comme la bête, sa course était celle de sa vie, ses jambes elles-même semblèrent outre-passer les règles de l’univers, si bien qu’il bénéficia d’une vision parfaite sur les ouvertures vulnérables de la créature.
Avec la grâce du daelwena et la clarté du désespoir, il tira avec brio sur la blanche créature, ses flèches chantaient leur précision, tant d’acier perçant au rythme répétée de sa course effrénée.
Les guerriers purent souffler, les lanceurs de sorts purent reprendre leur mana, les archers purent se repositionner et les cœurs détonnèrent en succession devant la course du vert vigile. La bête fut brisée, voyant qu’elle ne rattraperait pas l’agile rôdeur, rompit et tenta de trouver refuge dans la fuite. Mais les chasseurs ne laissèrent pas la bête s’en tirer à si bon compte et l’encerclèrent aussitôt. Après les coups répétés, les tactiques perpétrées et leur surnombre galvanisé, ils vinrent à bout de la mythique créature.
Les honneurs avaient été fait, le trophée remis à celle ayant donné le coup de grâce et bientôt les festivités commencèrent. Le rituel de la chasse éternelle était clair: afin d’absorber la force et la grâce de la créature tuée, il fallait la consommer. C’est ce que fit la troupe qui bientôt rompirent et dansèrent au son du crépitement des flammes de la victoire.
Devant l’enthousiasme Nalkiri, Ruvaen encourageait leur danse du percutement de ses mains, tout en restant silencieux et souriant. Son âme était légère et apaisée et malgré son cœur pas totalement investi dans la fête, il avait bien reçu le message que Lysaelle lui avait transmis.
Que peu importe le nombre, peu importe l’immensité et la puissance de ses adversaires…
Il n’avait pas à les affronter seul.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Dim 22 Nov - 10:25
Raison dans ses chaînes
"La psychée humaine, frêle et fragile, s’évince à la raison par la mort, qu’elle soit revêtue ou délivrée."
Enontië lé Effirië, Marcheur fantôme
L’affiche qu’il mirait l’avait raidit presque autant que cette main tendue vers les siens. En effet, l’urgence d’en finir avec le dragon Carbone avait précipité l’implacable daelwena à s’offrir comme diplomate au grand sommet de Terra. L’Ordre ovalique avait soumis ici, à la place des débats, son volontariat, ouvert à toutes critiques constructives. Ce qu’il mirait, ce qui le raidit, était l’unanimité des siens quant à offrir à Ruvaen Daith’Tirith, simple recrue, la voix entière des Daelwenas et ce … pour nulle autre que la défense du monde entier.
Il leva les yeux vers l'astre solaire, devant les ténèbres de l'inconnu, se baignant dans sa bénédiction. Lui, le médiocre et l'intempestif, allait mener une mission diplomatique de la plus haute importance. Ruvaen était loin d'être un diplomate, loin d'être un homme de compromis, loin d'être un exemple du sérieux placide dont ils avaient besoin dans l'heure.
Mais la tant détestée Nasticia lui avait fait don de la parole et de l'impitoyable volonté de mener son but à terme.
Celui de voir les siens prospérer coûte que coûte.
Ce même s'il avait à faire tout ce qu'il détestait. Le sacrifice sera fait, la tête haute.
Le poing au coeur: "Nwalya ëtehle" fut proféré. Cette fois, cette foi dans la souffrance, dans son inévitabilité et dans la renaissance promise par son outre-passage, était les chaînes au milieu desquelles dansaient raison et folie.
*
Le moment fatidique était arrivé. Les Daelwenas n’avaient pas répondu, en majorité, à l’escorte nécessaire qui mènerait Ruvaen en Hishtal. Tout comme la nature embrassait bien souvent le chaos de l’imprévisibilité, les siens avaient l’art de s’évincer aux pires moments. Inutile de dire que les nerfs du vigile furent mis à rude épreuve: avec la recette qui permettrait aux landes de dérober son grimoire sous ses ailes, Carbone avait toutes les raisons du monde d’intercepter son convoi. Il déglutit mais puisa dans la force de son unique alliée, Celyëwen, nulle autre que le devin de l’ordre ovalique.
Son regard à elle montrait la même inquiétude que lui mais le simple fait de sa présence fit gagner la raison, dans cette première ronde contre la folie. Inspirant profondément, la recrue tira brusquement les reines de Solaire et prit la direction de Val’Arak, avec la seule verte à ses côtés. Passant les grilles, foudroyant la distance jusqu’au feu des ancêtres, son pied eut l’effet d’une tonne sur la terre. Ils étaient tous là.
“Accompagnez-nous!”
Furent ses mots que les Nalkiris, ces braves sur qui il comptait une fois de plus, revêtirent en chantant leur approbation.
“AWOU AWOUUUU!”
Bientôt, les clans chevauchant à leurs côtés, ils atteignirent les derniers bastions d’Hishtal, là où le sommet les attendait. L’ordre d’une légion hastane ceinturait le chemin menant à ce dernier, une démonstration intimidante qui eut tôt fait de distraire le déjà secoué diplomate de fortune. Ce fut Celyëwen qui le guida une fois de plus, cette fois dans l’enceinte de l’interminable pagode. Devant Valkyss et les siens qui gardaient les portes, elle fut aussitôt acceuillit et sommée d’aller à l’intérieur. Cependant, c’est Ruvaen qui se présenta, saluant le Drakan avec une résolution implacable dans les yeux, né des ruines invisibles d’un vicieux combat entre ordre et chaos.
Bientôt il fut assis aux côtés des autres élus. La session fut ouverte par Valkyss qui remercia tous et chacun pour le rassemblement des essenses.
La discussion se poursuivit dans un calme maintenu malgré la tension palpable qui règnait dans l’enceinte de la pagode des Drakans. Carbone était la cible principale mais ne pouvait être attaquée directement puisqu’elle possédait un atout qui la rendait imperméable à tout heurt: le Kage, un drakan avide de chaos possédant un grimoire maintenant cette protection en vie. Le second de Carbone avait scellé ce précieux artefact dans les tréfonds marin, afin que nul ne puisse mettre la main dessus.
Or, alors que les piques fusèrent et que le venin commençait à s’infiltrer dans les discours …
Ruvaen prit cette opportunité pour amener l’antidote en clamant que les Daelwenas possédaient la recette d’une potion de respiration aquatique qu’il était prêt à partager avec le conseil, advenant qu’on lui prête oreille attentive. Brandissant son courage, il mis en garde le sommet qu’un sacrifice considérable serait le prix à payer pour sa confection.
À ce moment, la tempête rageant en perpétuité dans son esprit s’estompa et les éclaircies baignèrent son discours dans un calme limpide et serein.
“La recette stipule qu’il y a là quatre ingrédients. Les premiers seront simple, abondant et fortuit: une écaille de poisson et un pied d’algue printannière. De la poussière de la corruptrice Endicia est le troisième et le quatrième … un fragment d’aile nébulix.”
Cette dernière suscita une réaction divisée mais puissante, entre autres d’Iridia, nébulix printannière, qui s’y opposa avec passion. Suite à cette mention d’un potentiel sacrifice scandaleux, la discussion se porta immédiatement aux alternatives, l’une de celle qui ne réjouit pas Ruvaen qui peina à garder contenance, lui aussi nullement à l’écart de joindre la fosse des tensions raciales.
Saknyx, le représentant des Mortans, su déceler la hargne couvée sous ses paroles et la déception visible sur le faciès du Daelwena. Sans quoi il ne manqua de la pointer:
“Cela n’a pas l’air de vous réjouir, Daelwena.”
Mais avant que la discussion ne puisse fleurir, des bruits au dehors les empêchèrent d’aller plus loin.
Les escortes de chacun des peuples prirent aussitôt les armes, protégeant les représentants, ceux-ci incombèrent la lourde tâche de poursuivre la discussion avec en trame de fond, les hurlements funestes de leurs compagnons d’armes. Ruvaen en fut vivement secoué, on l’intima même de se rasseoir puisqu’il désirait désespérément défendre les siens contre l’invasion reptilienne.
Son regard écarquillé, miroitant l’horreur, ciblait le sol incandescent alors qu’il creusait ses genoux de ses doigts. Tural de Béon, le représentant hastane eut le même réflexe bien que son calme et son allure ne furent sacrifiés dans le processus. Un contraste qui démontre bien là la jeunesse et l’inexpérience du Daelwena, à l’opposé du vétéran qui était d’un siècle son cadet.
La stratégie avait été frappée au discours de chacun et trempé à l’accord de tous: L’Empire ainsi que la cavalerie lourde des peuples allaient attaquer Carbone et le Kage de plein fouet, alors qu’une division plus discrète allait, armé de potion aquatique, dérober le grimoire au fond de l’eau. Une fois celui-ci attrapé, il serait amené au château nébulix où les attendraient un membre de chaque saison pour le rituel final.
L’enjeu venait de grimper sans que le sommet ne perde son port altier. Un alchimiste se devait d’être appointé et les Nargolith se portèrent tout de suite volontier: Niryn T’sy Voltorä avait été désignée.
La pierre d’Endicia, duquel se devait d’être extrait une poussière, se trouvait dans le sous-sol du temple de Lysaelle et la nargolith choisie n’avait pas forcément à y être. Seulement … l’horloge était contre eux et le seul moyen de consolider les algues, les écailles, la poussière et les ailes rapidement était d’utiliser le portail magique créé par Iridia. Un des deux peuples devait faire sacrifice de ses lois et accepter l’autre chez lui.
Pour le peuple Daelwena, cela impliquait non seulement d’amener des Nargolith sur les terres d’Ilidelwis mais dans l’enceinte même du temple de leur déité. Il ignorait ce que cela coûterait pour Sombrum mais devinait que ce ne serait pas impuni. Si l’espoir de contrecarrer Carbone se devait d’être en vie alors il devait penser aux répercussions d’après-guerre.
Ruvaen se devait de réagir rapidement, de prendre une décision maintenant. Sans en être conscient, ce choix n’en était pas un: le daelwena était prêt à tout sacrifier s’il s’agissait que son peuple puisse vivre une journée de plus en ces terres. La représentante de Sombrum proposa un compromis: Ruvaen Daith’Tirith irait en terre Nargolith et Niryn T’sy Voltorä, irait en territoire Daelwena.
Le voilà devant un autre défi, alors qu’il se tint devant le portail voyageur d’Iridia, lui, Ruvaen Daith’Tirith, enfant de Lysaelle, se retrouve à la merci des enfants de Nasticia.
Encore une fois, il devra trouver raison dans ses chaînes.
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Dim 22 Nov - 14:35
Ombre et lumière
“Laimë a càlë”
- Simple reconnaissance d’un marcheur à un autre
“La valeur d’un être est proportionnelle aux nombre de vérités qu’il est capable d’encaisser.”
- Sanya Huru, Marcheur Fantôme
Une fois le portail franchit, Ruvaen se trouvait dans l’éternel contraste entre neige et nuit. Les constructions Sombrumoise étaient aussi hautes et menaçantes que le regard de sa population. Aux prises déjà, avec un sentiment oppressant d’être inlassablement observé, le daelwena se retrouva à priori désemparé. Derrière les rampes d’un vaste et sombre perchoir se tenait la dénommé Voltorä qui n’avait que des éclairs à lancer au vert vigile.
Et pourtant le temps ne s’était arrêté, la Voix de Sombrum, Ekatereliae menait le bal et tout comme Ruvaen, n’entendait pas à attendre. Elle les mena à travers la république en quête de cette denrée révulsante, sous les regards à peine voilés de ses habitants. Le daelwena reprit sa contenance et s’éleva du haut de plus de six pieds, une grandeur plutôt médiane chez les siens mais contrasté ici alors qu’on délimitait là la différence entre les deux peuples. Si les Sombrumois vivaient dans l’ombre du soleil, laiteux donc privés de ses nutriments, les Ilidelwissiens eux étaient tout le contraire. Croîssant tel les arbres de la forêt éternelle, leur territoire verdoyant regorgeait de gibiers se nourrissant à même sa plénitude, ayant pour résultat de renforcer significativement ses consommateurs. Pour ce qui était de Sombrum, la possibilité de choisir et de contrôler ce qu’ils avalaient était ce qui causerait leur déclin, selon Ruvaen. À s’éloigner ainsi de Lysaelle, les Nargolith s’étaient volontairement dénaturé.
À les observer, le garde sylvestre ne comprenait pas leur desseins mais reconnut, en conclusion, qu’ils avaient simplement choisi une vie différente. Certes, le Nargolith moyen ne vivait pas longtemps et ce à défaut de leur immense longévité. Chevauchant ce fait, pourquoi prioriserait-ils une approche de préservation? Même au vu de ses ennemis, Ruvaen cherchait à comprendre, un défaut peut-être de sa vibrante curiosité. Ce qui le frappait, cependant, était ce mutisme propre à ceux dont les dires immédiats ne pesaient pas plus que le poids du silence. Il savait le peuple blafard discret mais ce qu’il remarqua c’est qu’en même situation, lui aussi adoptait cette approche. Le même calcul, la même analyse, celle de l’assassin: l’intérêt brûlé dans la rétine dans le but d’une habile imitation ou d’une froide déconstruction. À cela, il leva les mires en direction de l’astre solaire afin de colmater sa raison et d’y puiser réconfort.
Laimë a càlë.
"Ombre et lumière."
Peut-être qu’eux aussi avaient ce maelstrom tempétant sans répit dans leur esprit? Eux aussi trouvaient réconfort dans cette vigilance incessante, ce jeu répété, celui d'aplanir ce chaos en le pressant contre l’affiloir de l’ordre?
Il n’y a pas que les ombres qui camouflent; l’effet de lumière aussi est un puissant faux-semblant.
Le daelwena savait que ses laiteux cousins lui servaient la pareille et pour cela, de haine il n’avait. Néanmoins, quelque chose avait changé dans son fort intérieur. Une clarté dans le monde des ombres, une lucidité lui permettant de voir plus loin que le mal de son existence. À cela il s’entendait:
“La valeur d’un être est proportionnelle aux nombre de vérités qu’il est capable d’encaisser.”
Puis il fut interpellé, c’était une femme dont la délicatesse était palpable, dans sa voix et dans son décorum ou était-ce cet effet de lumière martelant son subconscient? Sa tenue était de blanc vêtue, ses yeux vert et francs, sa question teinté d’un soupçon d’innocence.
En d’autres mots, une nargolith d’une terrifiante efficacité.
Il se défit de celle qui se nommait Eldwae, qu’il sonda sincère, en lui abandonnant son nom puis trouva refuge dans l’aversion palpable mais compréhensible que lui servait Niryn. Ils étaient tous devant la garnison de la république alors qu’ils se butaient à des portes vérouillées. La Voix de Sombrum fit venir une de ses lames noires, un dénommé Kilath qui leur permit ainsi d’y pénétrer. Elle disparu à l’intérieur puis après un interminable moment, revint avec les fragments pour les remettre au mains horrifiées du Daelwena. Ce dernier remarqua qu’ils avaient été taillées net, cautérisé par une flamme d’une nature qu’il préférait continuer d’ignorer.
*
La cohorte Nargolith avait été menée en territoire d’Ilidelwis par Ruvaen, lui-même talonné de près par Kilath, l’unique gardien de cette troupe. Ekatereliae lui avait donné des ordres concis dès leur départ de Sombrum:
“Ne perdez Niryn ni le Daelwena de vue.”
Sans quoi il s’était exécuté avec un silence impeccable et malgré le poids de celui-ci, le garde à l’armure de jais avait su faire imposer sa présence. Il ne l’avait pas laissé se distancer, pas d’un iota. L’efficacité des lames noir lui avait laisser un froid glacé dans le dos, de ne pas savoir s’il était à ce point immuable ou à ce point effrayé par le châtiment que lui réservait la voix en cas d’échec.
Après avoir visité le temple de Lysaelle et constaté la pierre d’Endicia absente, ils décidèrent plutôt d’aller cueillir des échantillons de sol corrompu, au pied d’un des arbres bénis par la déité. À observer l’alchimiste s’effectuer, une pensée accompagna leur départ:
Soit venait-il de prendre la meilleure décision qu’il n’avait jamais prise ou la pire. Une chose cependant, était claire: la sauvegarde de Terra importait plus que tout.
Avec un peu de chance, demain les landes ne seront plus là. À quoi il éviterait la honte d’un inévitable châtiment.
Plutôt mourir que de vivre déshonoré.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Mer 25 Nov - 4:40
Que se lève l’extase, qu’elle se lève en ce paradis échoué!
"Je ne veux pas faire surface au delà l'épave prophétique de ma triste fierté"
-Dar'Ethruna, Laimëtar "Roi des ombres"
Ruvaen menait le groupe assigné à la cruciale mission du grimoire vers les portes des abysses. Certes, ce bâtiment d'une architecture sans nom ressemblait au sommet d'une pyramide échouée dont l'entrée ouvrait sa gueule béante et dentelée vers les tréfonds obscurs de l'océan. La simple vue de cet étrange monticule savait chasser le rationel et moissoner le frimas sur l'échine de la petite troupe.
Cependant, c'était à l'intérieur de ce mausolée d'effroi que les nargolith, mortanyss et l'unique daelwena devaient trouver le grimoire du sombre Kage.
L'alchimiste Niryn Tsy Voltorä se tenait derrière, gardienne et contremaîtresse, aux côtés de son chariot dans lequel se trouvait un nombre incalculable de potions de respiration aquatique. Son unique tâche était d'approvisionner les troupes ainsi que recharger ceux assez fortunés pour refaire surface.
Le temps n'était plus à l'hésitation et lorsque Ra-mu, dernier enfant de Carbone, brisa le sceau de la porte, les vaillantes ombres pénétrèrent dans les profondeurs interdites et oubliées des abîmes de Terra.
Tu es faible… beaucoup avant toi s’y sont aventurés …. Futile …. Futile….. Tout est …. futile.
Si ombres ils étaient, alors les tréfonds marins les acceuillait comme autant de froides alliées puisque aucune lumière n'y perdurait. Le seul son perceptible était les constantes vibrations de l'eau et des doutes se réverbérant dans leurs âmes agitées. Chaque pas n'en était pas un, chaque pensée, doute ou appréhension semblaient prendre forme alors que les lois du temps et de l'espace étaient noyées dans le noir absolu.
Ton courage faillira… un par un … ils feront face au désespoir … et toi aussi….
Les mortanyss menaient maintenant la troupe car tristesse, peur et désolation étaient autant de bêtes qu'ils avaient depuis longtemps apprivoisées.
Ylgu était devant, une succube au pouvoir ensorcellant. Elle était plutôt gracile, grande et d'une beauté qui savait capturer l'âme des hommes. Ce n'était pas la première légende qu'elle lui évoquait mais c'était la première fois qu'il en voyait une en action.
D'innombrables cris gutturaux semblaient foncer vers eux, avec dans le lot, d'autres son innomables, si horribles qu'il conjurait dans la troupe une peur ancienne et malveillante.
Tue les tous … avant qu’ils ne te tuent à leur tour. Les aldens n’existent pas … ce n’est qu’illusions et machinations … le lysée … l’avdombe … lysaelle … mensonges ... il n’y a …. que l’entropie…. le vide … l’oubli...
À priori, ce fut les hommes-poissons: de courtaut et voûtés humanoïdes aux yeux horribles et globuleux. Agitant leur lances en nombre mais sitôt mis à l'épée décharnée du chevalier de la mort à leur côté qui attaquait les troupes infinies à la méthode du cavalier sur les dalles blanche et noir de l'échiquier.
Ils avançaient à la morne lumière de Xeleron, une liche à la parole rapide et aux sortilège foudroyant. Et s'armait des immenses spectre aux commandes d'un quatrième mortanyss dont le nom n’avait été prononcé.
Peu importe tes aspirations, ils ne valent rien, seul le vide est réel … Tu le sens en ce moment … hier, aujourd’hui … demain ... à combattre pour l’emplir … repose-toi … rejoins-nous...
Les troupes aquatiques se leurrèrent aux moult répliques parfaites de la succube qui n'offrait qu'un rire suggestif et funeste à chaque fois qu'ils perçaient l'air de leurs tridents.
Ruvaen était submergé par l'horreur et tirait sans voir sa cible, ne sachant pas qui redouter le plus entre ses ennemis et ses alliés de fortune. Les Nargolith aussi formèrent une phalange invisible mais efficace, autant d'éxécuteur agiles et mortels.
Tes compagnons t'abandonneront… déjà ils ne te regardent plus … L'oubli apporte réconfort …. Ils t’oublieront …
À un certain moment, une masse colossale serpentait les ténèbres et lorsqu'il passa outre les braves, le daelwena pu apercevoir le derme écailleux d'un serpent de mer filer, jonché de flèches. Les horreurs ne cessaient de tester les psychées fragiles des êtres de surface qui tentaient désespérément de se frayer un chemin, n'avançant qu’à pas de tortue.
Tue les … renvoie nous les… remplace les….
Ces mots résonnaient dans sa tête à mesure que sa résistance se fissurait. Bientôt les autres commencèrent à partager ce désespoir, ce vide, cette … voix. Son arc tomba au sol, ses mains vinrent s’accrocher frénétiquement à sa tête, tirant ses cheveux avec horreur. Une irrésistible envie de pousser ses globes occulaires jusqu’à ce qu’ils éclatent commençait à monter en lui.
Cet endroit était maudit.
Leur avancée ne menait à rien, le temps était contre eux, combien de temps allait durer la diversion? Le saint empire était peut-être déjà en déroute et Carbone en train de dévorer le monde tel qu’on le connaît.
Carbone ... n’est qu’une fausse reine … elle apprendra … personne ne règne éternellement …. Je suis éternel … je suis le réel souverain….
Devant leur nombre de plus en plus mince, le Daelwena abandonna son armure, son arc, puis s’engouffra loin dans les profondeurs des ténèbres. Son cœur battait la chamaille, son esprit vascillait entre raison et folie, ses membres poussaient vers l’inconnu et inconsciemment … vers cette voix. Il ignorait même s’il ne s’agissait pas de la sienne, car elle portait le même timbre, la même intensité, la même intonation .
La fin du monde …. approche …. mais ce n’est pas Carbone qui l’amènera … l’humanité … l’humanité …. L’humanité…. lorsqu'elle ne sera plus ... les conflits recommencerons... l'ennemi ... est en vous.... vous et les vôtres sont condamné ...
Une étrange lumière le guidait, ne sachant pas si celle-ci était réelle ou non, mais l’image se formait dans sa tête de cette même pyramide d’où le sommet n’était visible qu’en surface. Les pierres qui l’amoncellait était une stéatite verdâtre et anormalement friable au toucher. Les inscriptions envahissant son pourtour étaient d’anciens symboles d’un peuple oublié. Son approche fit resurgir en lui une peur ancienne, la même qu’il avait ressentit en plongeant dans ces abîmes. Comme si son être entier s’armait d’un baggage que lui avait laissé des générations et des générations de ses ancêtres qui eux avait cotoyé ce mal et passé cette mise en garde à ses enfants jusqu’à aujourd’hui.
Ruvaen …. Ruvaen ….. Ruvaen….
L’oppression était réelle, ce mal était réel, il en était certain et ainsi seul contre la folie … sa raison commençait à fuir ses doigts comme le ferait autant de grain de sable face au vent.
Ta quête est futile … Carbone … le Kage …. n’est pas ici …. ni son grimoire … il est … avec elle….
Tu es à moi … tu as toujours été mon laquais … vous êtes tous …. mes laquais…
Dévorer … tout dévorer…. Tout ….. DÉVORER TOUT
TOUT TOUT TOUT TOUT TOUT TOUT TOUT
La réverbération était trop grande, elle se déchaînait de plus en plus vite, de plus en plus fort dans sa tête. Cette fois ce n’était plus un maelstrom mais un interminable raz-de-marée, menaçant d’engloutir les restes de sa raison. Ses mâchoires étaient soudées, ses mires ouvertes, si grandes qu’elles semblaient exorbitées, horribles et affolées. Il ne savait plus s’il touchait, voyait ou entendait, la sensation aurait été décrite comme une lumière palpable, ressentie, goutée … comme s’il expérimentait ses cinq sens tous à la fois et en même temps.
Puis lucidité.
Tout était clair maintenant: sa mission, son retour, ses alliés. Il les retrouva en surface, ne sachant pas du tout comment il l’avait retrouvé mais lorsqu’il regarda derrière … plus rien. L’entrée des abysses était close, lisse, comme si elle n’avait jamais existé.
Il regarda au ciel et vit aussitôt Carbone volant vers Kar, le Kage bien en vue sur son dos, grimoire en main.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Dim 29 Nov - 10:18
Au nom des chasseurs de dieux
“Péché incarné, Au parfum de l’ambition Les chasseurs l’ont reniflé Plus qu’en chair et en os, Ascensionné, Les chasseurs l’ont traqué Un trône sculpté d'effroi, échoué dans le ciel Tourmenté, Les chasseurs l’ont pourchassé Libéré de sa foi, Enchaîné des abysses Les chasseurs l’ont encerclé À mettre en lumière son immortalité, L'étendue de son ombre Les chasseurs l'ont questionné "Pourquoi alors rester si longtemps cachée?”
- Ode au printemps des chasseurs
Aussitôt tiré du gouffre de son âme, le daelwena fit face à celle de Terra.
Les troupes kheijanne et hastane étaient dans cet état de dissension, autant formèrent-ils un cercle que celui-ci était vicieux. Fier et haut, jamais n’eut-il vu autant de perchoir se tirer de si bas couteaux. Cette voix dans les abîmes, horrible et démente, avait-elle donc eu raison? Carbone n’était-elle que le catalyste d’une guerre plus repoussante encore puisqu’elle balayaient de ses ailes autant de masques? À se quereller ainsi, ils réduisaient leur chance déjà mince, à néant. Par chance, la mobilisation des Kardars vers Kar, époumonnée par le Maréchal Turin Forg’slim mis à dessein ce que tous pensaient tout bas. Si des êtres aussi infimes et têtus étaient les plus sages d’entre tous alors autant d’hastane et de kheijan ne les laisseraient pas saisir la toute gloire.
Les portails s’ouvrirent et autant de violence fut mis à profit à la défense de Kar.
Lorsque Ruvaen arriva à la place de l’arène, les Kardars lignait déjà les hauts murs en train de tirer sur le gigantesque dragon à l’aide de balistes monstrueuses. Tandis qu’au sol, les arcanistes peinaient à contre-attaquer au souffle de la bête, leur geysers permirent tout de même le passage de beaucoup en lieu sûr. Des ordres furent sitôt hurlés, des cris s’étouffaient et des bruits d’épées et de boucliers ragèrent dans une dissonante cacophonie. Les soldats du Yokai pulullaient comme une peste noir, à chaque porte autant de cors étaient sonnées, Kar fut donc bien vite submergé. Ruvaen couraient de ruelles en ruelles, tirant sur tout ce qui revêtait des écailles, un masque de terreur et un sifflement terrible. Le visage couvert de suie et de sang, le tueur s’efforçait de ralentir ce terrible promontoire. À bout de souffle, il marqua une pause, ses mains rouges et calleuses reposant sur ses genoux.
Il dirigea son regard vers l’astre solaire en quête d'un ultime requiem mais rencontra plutôt une différente déité: Carbone. De son immensité, elle plongeait Kar sous une ombre profonde et malveillante. Le chasseur rencontrait son regard digne du néant, statuesque et formidable.
Ton courage faillira …
UUM!
Hurla t-il à lui-même, en direction du dragon.
Comme si son courage répondit à l'appel: une flèche de baliste toucha le dragon, expulsant le Kage de sur son dos, dans une chute vertigineuse.
À ce moment, les soldats du Yokai percèrent les défenses d'un cri perçant et se déversaient à une vitesse affolante dans la cité. La situation était critique, le Kage quant à lui … restait d'un calme déroutant. Crachant une incisive, il arborait fièrement ce sourire carnassier.
"SssSssSss …. Autant de chaos … délicieux."
Il n'hurla pas sa charge et fondit sur les régiments les plus près. Son requiem était mort et ruine, chantant au son de sa lame, châtiant tout sur son passage. Son clameur était une délivrance sans souillure à l’alden du xuan, un désir sourd et sincère d’amener une violente destruction à la cité pour le simple fait de l’amener.
Inévitablement, ruine n'amena que ruine.
Les landes entières lui rendit la pareille, autant d’épées, de rage et de coeur le blessèrent avant qu’il ne subisse une fin de violence rendue.
La saisit du grimoire souda, l’armée de Terra qui ne formait à présent qu'un seul poing dont les phalanges criaient vengeance au nom de la civilisation.
Et le rituel pour le détruire s’ensuivit, autant d’essence chatoyante ceinturant les nébulix choisit unifièrent chaque saison dans une explosion vive et aveuglante.
Ce sacrifice tira Carbone de son trône divin, une ultime flèche provenant du courage amalgamé des peuples de la terre.
Un grondement sourd annonça son atterissage, ses immenses ailes plongeant les défenseurs dans une ombre profonde et oppressante. Si bien que nul n’osa ouvrir la bouche - à défaut d’en être capable - ni même de bouger d'un traître iota. Dans le ciel, elle avait inséminé la peur en eux mais sur terre ... elle rompait les esprits et plongeait chaque défenseur dans une vrille démente de désespoir débilitant.
Cependanr, malgré sa divine majesté, elle était vaincue. Sans le Kage, sans le pouvoir du grimoire ainsi rompu par le rituel nébulix, elle savait bien qu’elle ne pouvait pas vaincre dès lors l’effort commun des défenseurs de Terra. Elle proféra menaces, malédictions et sombre prophétie sans quoi elle disparu dans un faisceau de lumière d’autant plus immense que sa masse corporelle.
Pour la première fois depuis l’avènement de cette menace, Ruvaen eut l’impression de souffler. À entretenir les méandres tentaculaires des pires spéculations, il s'était lui-même érigé cette nauséabonde prison. En opposition, il profita de la fraîche brise du printemps caressant ses joues et ses paupières pour respirer le parfum de ce purgatoire accomplit.
À l'arrière de ses pensées, le daelwena savait que les abysses guettaient leur chance d'envahir les esprits à nouveau et que menace telle Carbone ne serait pas la dernière à les affronter.
Mais...
Qu'ils soient tapis dans l'ombre ou la lumière, dans l'océan ou dans le ciel … les chasseurs auront tôt fait de dénoncer son immortalité.
Qu'ils viennent.
*
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Lun 30 Nov - 18:43
Malveillance ancienne au coeur de la terre
“L’être humain n’est pas fait pour voyager au-delà de son îlot d’ignorance.”
-Auteur inconnu
Ruvaen marchait sous le soleil couchant pour une habituelle chasse, coutume était-ce pour lui afin de garder ses sens aiguisés. Depuis Carbone, il n’y eut pas grande menace qui demandait son expertise et désirait malgré tout demeurer préparé. Il préférait conduire une traque la nuit, ne possédant pas de réelle entrave à chasser dans le noir, le daelwena puisait beaucoup d’énergie lorsque les lunes étaient présente.
Son choix était simple: si ce n’était pas des hors cycle, c'étaient les ophidiens. En effet, cette race d’humanoïde à la queue serpentaire savait cultiver le mystère de par son unique présence sur ces landes. Nul part ailleurs s'étaient-ils aussi bien établis, dans une immense citadelle fortifiée dont l’architecture trahissait une main humaine. L’avait-il conquis alors? Et si oui, à qui? De plus, pourquoi n'avaient-ils pas émis de vœux de conquêtes encore? Pourquoi leur organisation était-elle si mal constituée alors que leurs archimages prouvaient être intelligent au simple nombre de sortilèges qu’ils envoyaient.
Elan’iel l’avait informé que lui aussi portait un œil fréquent sur cette race reptilienne, par le simple fait qu’ils se reproduisent plus rapidement que les Ssins. Alors pourquoi n'étaient-ils pas davantage? Était-ce parce qu’ils envoyaient leur femelle au front? Si on les apparentaient aux serpents alors ils se reproduisent à la ponte, l’absence de mâle pouvant donc facilement s’expliquer. Toutefois, tout ça n'explique encore pas la présence d’un roi. Cette particularité, parmi d’autres, rongeait le chasseur qui passait ses nuits à façonner des réponses à ces questions.
Qu’en sait-on réellement sur eux? À quel point sont-ils identiques aux serpents? Tout cela pourrait n’être que supposition, camouflant une origine bien plus archaique encore.
Mais Ruvaen se savait l’imagination fertile alors ce genre de questionnement prenait immédiatement l’arrière scène dans l’arène de ses priorités. Lorsqu’il cessa net devant l’entrée du fort, son regard se déposa sur l’immensité de celui-ci. Cette citadelle devait avoir appartenu à un peuple civilisé, la maçonnerie prouvait avoir enduré l’usure du temps ainsi que ses intempéries. Au même moment, deux cavaliers se présentèrent aux abords de celui-ci, armes en mains et prêts à la prendre d’assaut eux aussi.
Il découvrit là deux Kheijans du nom de Belal Shareef et Nora El’Kheira. Ruvaen ne connaissait pas bien le peuple des sables mais leur proposa tout de même de chasser à ses côtés. Un rituel que ses ancêtres avaient perpétré avant lui et dans lequel il avait confiance. Pour le Daelwena, si les deux Kheijans prouvaient leur valeurs sur le terrain alors ils seraient au moins dignes d’être connus. Du même fait, aux mires violacées du pragmatique vert, les dires n’avaient pas de valeurs outre le serment et s’il avait à juger des étrangers alors leurs actions parleraient pour eux.
C’est ainsi qu’ils débutèrent cette évidente purge, ce contrôle de population que lui et les siens s'adonnait fréquemment afin d’éviter les potentielles regroupement qui évolueraient en invasion. Au yeux de l’équilibre, du cycle sempiternel, s’ils n’arrivaient pas à se défendre proprement alors il valait mieux qu’il périssent. Il n'y avait pas de philosophie plus harmonieuse que celle-ci pour le chasseur aux oreilles affûtées.
À parcourir la citadelle des serpents, les trois se frayèrent un chemin aisé en coulant le sang de guerrières et éclaireuses. À poursuivre, il fallait indubitablement passer par leur tunnel, beaucoup moins bien construit et sombre … très sombre. Si bien que chaque recoin semblait d’une noirceur presque palpable, celle qu’on ne voyait qu’aux endroits où le soleil ne se rendait pas. À observer ces tunnels, Ruvaen ressentait toujours ce malaise, cette peur qui semblait provenir d'ailleurs, celle que les hommes-serpents n’infusait pas en lui à eux seul.
L’horrible impression d’être observé, analysé, étudié par d’innombrables yeux le gagnait à chaque fois. Cependant … un retour à la réalité lui intimait que tant de si petit recoin ne pouvait pas abriter autant de reptiles. Ainsi agissait la peur, dérobant raison aux sens et magnifiant la menace devant alors qu’elle n’était pas digne d’être autant considérée. Chaque cadavre laissé derrière était un autre pas vers les profondeurs et pourtant, l’obscurité ambiante semblait toujours posséder une présence … une malveillance propre à elle.
Son inconfort était le même qu’au fond de l’océan, un sentiment que l’effroi n’était jamais loin, né d’ancien édit qui savait hameçonner en lui une peur sans nom. Quelques guerrières serpentaires plus loin, le Daelwena, le cavalier et l’archère arrivèrent à une grande salle aux multiples colonnes. Au milieu de celui-ci s’érigait une pierre de cristal d’un jais profond autour duquel semblèrent siffler un regroupement d’archimage n'ayant pas été alerté à leur présence.
Et avec raison, l’obscurité ici était pesante, comme autant de mains pressant sur ses épaules, tentant dirait-on de les amener plus profondément dans la terre.
La charge de Belal fut décisive, un simple coup de son immense épée et plus d’ophidien que de raison tombèrent en résultat. De même, Nora et Ruvaen profitaient d’un couvert épais, tirant plus de trait noir qu’il n’en fallu pour abattre toute résistance.
Cette pierre noir résonait dans la tête de Ruvaen, qu’une infime vibration douce, soutenue, incessante ... Il s’en approcha alors que ses compagnons de fortunes s’occupaient des blessures de Belal et remarqua qu’une image se formait à l’intérieur. Une obscurité d’autant plus dense que celle qu’il avait remarquée tapis dans chaque recoin des tunnels ophidiens. Le Daelwena s’approcha plus près encore, plissant ses yeux insoupçonnés comme autant de meurtrières prêtes à tirer. Son attirance pour celle-ci semblait inhumaine, passant outre sa méfiance bien alerte, sa main vint alors se poser sur le cristal.
À ce moment, il traversa cette dense obscurité, laquelle l’harponna pour l’amener survoler les tréfonds maintenant clairsemés des souterrains de Terra. Une cité sous la cité, pullulant d’hommes-serpents aux yeux perçant les ombres, une gigantesque hallebarde en mains. Des tunnels qui creusaient jusqu’à on ne sait où, offrait la vue sur des milliers et des milliers d’oeufs monstrueux, surveillé par autant de contremaîtresse aux écailles luisantes et au sifflement menaçant. Une cacophonie terrible de ces sifflements était incessante, tout comme les chemins tortueux formant la cité sous les cités. Jusqu’où s’arrêtait cette nation sous la terre…? Des lignées d’Hastanes, de Daelwenas, de Kheijans, de Nargolith entre autres, avançaient en rang, enchaînés, dans la direction que prenait celle du fouet. On les conduisait dans une immense fosse plongée dans la pénombre, où les hurlements d’effroi et de supplice étaient d’autant plus interminables que inhumains.
Aucun n’en sortirent mais des fosses connexes montraient des humanoïdes de taille similaire et au visage reptilien. Leur corps grotesque et voûté se recroquevillait sur eux même, leur petite mains aux doigts crochues plaqués d’un revêtement d’écailles luisantes et visqueuses. Ils peinaient à ouvrir deux yeux larmoyant et vicieux dont les pupilles clignaient désormais à l’horizontale.
Une queue inachevée pendait à leur séant et leur jambes chétives et décharnées semblèrent trop faibles pour les supporter.
D’autres fosses ritualistiques abritaient des ophidiens portant des toges à capuchons, avec une étrange lueur humaine dans le regard. Ils chantaient entre leur affreux sifflement autours d’un autel, une pierre d’un cristal noir mais immense et malformé. Une ombre malveillante se déversait de celle-ci, rampant comme autant de doigts informes jusqu’aux paroies de la caverne pour ensuite remplir le cellier d’un véritable cosmos rempli d’un millier d’étoiles.
À s'élever si haut dans cette galaxie noire, il pu voir cités après cités sous la terre, à travers les tunnels qui les reliaient: un empire sous les empires. À cette terrible réalisation, ses yeux montèrent comme il le ferait pour un ultime requiem vers le cellier étoilé.
D’étoiles il n’y en avait pas.
Mais plutôt autant d’yeux horribles et grouillants.
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Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Lun 14 Déc - 2:54
Que tes rêves soient grands
“Nous partageons la foi, piégée sur les pages d’un ouvrage écrit par le même auteur de la ruine de ce monde.”
- Ruvaen Daith’Tirith
Lomë, son faucon voyageur était revenu sans pli et c’est à ce moment qu’il comprit qu’il était seul à nouveau. Il abaissa les mires devant les conséquences de ce bris de communication et cogita longuement sur ses prochaines actions. L’éternel contemplait alors une fois de plus, la saveur de chaque minute qui composait son existence, celle qui n’est perceptible à ses lippes battues que lorsqu’il fait face à la mort.
“Laimë a Càlë.”
Dit-il en regardant le ciel, en contemplant l’astre solaire pour cette éternelle prière. “Ombre et lumière” était cette phrase qui résonne encore dans sa tête malgré ce chemin esseulé qu’il reprend. Son expression demeura intemporelle, ses yeux clos coulèrent à flot sans qu’un seul sanglot ne soit audible. Il embrassa cette tristesse qu’il savait part entière du cycle avec une étrange sérénité. Une libération de sa personne qui aurait assurément des conséquences latentes pour son peuple. Ruvaen s’était juré qu’il serait le gardien des abysses mais cette fois, les abysses avaient gagné. Elles agissent à travers tous les conduits: d’esprit comme de corps, d’âme comme de cœur, elles se glissent à travers le plus infime désir et traverse la plus grande ambition.
Ce qu’il faisait, il le faisait toujours pour le peuple Daelwena. Jamais n’avait-il oublié sa famille puisque de sa moindre joie jusqu'à sa plus grande peine étaient inextricablement liées à celle-ci.
Il était grand temps que le gardien se remémore ce qu'étaient les abysses.
Elles sont une présence invisible et vorace, un vide entropique visible uniquement par le constat de sa dévastation . Elles sont le monde entier mais vu à travers l’axiome d’une malveillante trinité: l’arrogance, le ressentiment et la duplicité. La souffrance étant la seule constante, la seule vérité absolument irréfutable par laquelle nous percevons l’existence, c'est donc par celle-ci qu'elles sont perçue. Chacunes des pointes de cette triade est une porte, débouchant sur un long corridor menant au fond de cette vacuité. Elles sont le chaos sous sa forme la plus brute, un gouffre dans lequel rien n’existe puisque tout est en constante mutation. Je me remémore Carbone pour exemplifier, cette dragonne qui n’aspirait qu’à mettre en pièce le monde entier, s’attaquer à la civilisation dans son ensemble, à l’ordre lui-même. Étant un être doté d’une intelligence divine, comment s'était-elle alors rendue jusque là? Elle fut d'abord le ressentiment: n’aspirant qu’à nous arracher au monde sur lequel Zhel Yen Xuan nous a transporté simplement par une haine pure, vorace et polarisante. Nous ignorons encore ce que le dragon ZyX lui a fait, mais une telle aversion ne peut provenir que d’une profonde envie, ressentie des milliers de fois durant. Elle fut l’arrogance: de se croire ainsi assez grande pour affronter le monde et d’ainsi se faire expulser par les forces combinées de Terra. En sommes, de mal évaluer sa valeur au sens propre: personne ne devrait prendre d'assaut le monde à eux seul. Enfin, elle fut la duplicité: de se mentir sur sa propre valeur, de la surestimer et ainsi, par cette vision tordue de la réalité, d’attaquer de front le berceau même de l’existence.
On dit que les rêves sont porteur de ce même chaos, que le monde onirique qui nous reliait tous était donc un vecteur potentiel des abysses.
Bien entendu, tout mal se tient dans le surcroît, dans l’extrême, dans le fond du gouffre. Le chaos forme aussi l’ignorance, le potentiel, le territoire non exploré, la passion et l’espoir, tout ce qui est intangible et peut mener à du bon. L’ordre aussi, à son opposé, peut mener vers les abysses, simplement par sa capacité à tomber amoureux de lui-même et de ses créations. En effet, il est souvent idéalisé, par exemple par la société Hastane ou Kheijanne qui croient que leurs traditions se doivent d'absolument prévaloir sur les nouvelles idées. Que la lumière doit submerger chaque individu, que ce soit dans la vérité dite ou dans les flammes d’un bûcher.
Nous tendons vers ce dernier, nos civilisations le prouvent de par leur bâtiment, de par le besoin récurrent d’être en sécurité ou encore d'assermenter la loyauté de nos alliés.
Il observa l’étendue même de la forêt éternelle et savait à ce moment que Lysaelle lui envoyait un message, une épreuve: celle du deuil. Le tueur des bois savait qu’il ne devait pas atténuer sa vigie, il devait trouver d’autres moyens pour suivre son avancée et lui imposer une halte ne serait-ce que momentanée. L’éternel chasseur avait sa proie en mire et même si elle se trouvait à être invincible, sa traque s’avérerait elle aussi, incessante. Après tout, Carbone aussi s’était dite invincible et pourtant, sa chasse est terminée.
Son avenir était sombre et incertain mais cette réflexion lui apporta une momentanée clareté, une sécurité sur laquelle il put au moins mettre le pied.
L'un dans le chaos et l'autre dans l'ordre.
Et...
N’était-ce pas là signe d’harmonie alors?
Ruvaen Daith'Tirith
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Sujet: Re: [BG] Ode à la saison des abysses Jeu 24 Déc - 23:48
Le serment à la vie à travers la mort
“J’ai servi, je serai de service.”
- Ruvaen Daith’Tirith, Gardien des abysses
Le soleil du Sina’far était tel qu’on l’avait prévenu: ardent, omniprésent et impitoyable. Sous son capuchon protecteur cependant, le gardien comptait imiter l’astre solaire contre le promontoire des tréfonds de la terre. Même sa monture, peu habituée à une telle ardeur, avait hérité de son outre. Ruvaen avait une empathie sans pareille pour les bêtes et c’était précisément pourquoi il avait fait ce voyage.
Accompagné de Belal Shareef et de Nayma El’Mostefa, il laissa aux soins de l’éleveur les reines de son destrier. Il fut conduit alors à l’aire de repos, là où les soldats des sables prendraient le thé. Ruvaen les observa un à un, autant d’hommes et de femmes au quotidien organisé, faisant calmement face à la fin de leur patrie. Ce fut ce qui rendit curieux le chasseur des bois: à quel point chacun d’entre eux montrait une discipline stoïque alors que la mort accueillait lentement leur chez soi.
Oui, c’était la situation au royaume des sables: les oasis étaient teintés, les bêtes malades et condamné, et bientôt ce serait leur tour.
Le représentant Kheijan avait fait connaître ces maux au Daelwena, demandant son aide afin de rassembler les ingrédients pour la potion de respiration aquatique. Un gouffre avait été repéré non loin de Najarhim et après la traversée d’un temple souterrain, une voie aquatique vers les profondeurs des abysses avait été révélée. Le rôdeur avait su renifler le travail d’Endicia à la première phrase proférée par le diplomate Jaled Shiraz et son travail était de préserver la nature dans sa grande harmonie contre la dévastation sans fin du chaos.
Ruvaen accepta sans hésitation.
Pas pour Lysaelle ni pour le peuple Kheijan ou encore le désert du Sina’far mais pour halter la marche de son ennemi juré.
Il ferait donc ce qu’il savait faire de mieux: entendre, traquer, détruire.
Tout cela afin de protéger les siens de ce mal qui n’avait pourtant aucune animosité avec le moindre peuple de Terra. Tout comme son meurtrier mandat, les abysses attaquaient la matière jusqu’au moindre grain de sable et donc n’avait rien de personnel. Il songeait à cela alors qu’il était assis en tailleur, l’allure sombrement sereine, à la table où son thé des bois fumait devant lui.
À la suite de ce rituel, le Pacha Belaal informa les troupes des dangers à venir et de l’enjeu plus grand encore de les traverser. Son discours résonna à travers l’aire de repos et l’ardeur moissonnée dans le cœur des soldats rivalisa avec celle du soleil lui-même. L’armée de Najarhim était donc en route vers le gouffre, après avoir reçu de la Vizir Nasreen, le nombre adéquat de potions aquatiques pour chacun. L’organisation était précise, les ordres clairs: les protecteurs devant, ensuite les guerriers, les vizir puis enfin les rôdeurs qui composaient la pierre angulaire de la troupe.
Il gagnèrent le temple devant lequel l’eau trouble miroitait, autant d’horreur innommable et submergé les attendaient assurément. Chacun ouvrit son flacon et buva à même son courage, ses flots amalgamés par celui qui menait la marche.
Comme prévu, les profondeurs souillées de la nappe phréatique du Sina’far regorgeaient d’immondices amoncelés, de véritable élémentaux aux griffes graveleuses et putrides. Aucun soldat n’avait le loisir de communiquer alors ce fut dans un silence vibrant d’atrocité qu’ils combattirent contre l’élément lui-même. L’effet magique de la potion ne leur permettaient pas uniquement de respirer sous l’eau mais aussi de plier sa gravité à leur avantage, autant de coups donnés et de flèches tirées comme s’ils étaient à la surface. C’était pourquoi sa composition et sa création étaient garantes d’un lourd coût: le sacrifice d’un être ailé, l’un de ceux dont la naissance magique transcendait le temps et l’espace.
Ruvaen chassait cette idée de ses pensées, prêt à tout sacrifier pour combattre cette monstrueuse polarité.
À priori, les tréfonds marins étaient calmes, le silence et les vibrations étaient leurs seuls compagnons alors qu’il gagnèrent une caverne tout aussi placide et dégagée. À l’intérieur se tenait un coffre verrouillé, submergé depuis des lustres, leur communiquant là la possibilité d’être riche avant d’être mort.
Le désintérêt pour les richesses du Daelwena lui permit d’admirer la faune et la flore, sans quoi il découvrit une infime brèche dans le coin nord de l’étrange cavité. Une fois pointée, les soldats se mirent alors à piocher la crevasse afin de révéler une entrée insoupçonnée.
Les premiers à y pénétrer découvrirent avec horreur leur hôte: une véritable armée d’amphibiens déformés et armés jusqu’aux dents. Le chasseur vert suivit la formation de Belal et s’assura d’être digne de l’invitation.
Ses flèches étaient précises et mortelles, porteuses d’une mise à mort sereine, d’une exécution justifiée par son vertueux devoir. Dans le regard du vert, l’éclat empathique d’autrefois couvait maintenant une analyse plus froide encore que les eaux souterraines qui l'embrassaient. Sa vision centenaire guidait ses traits lumineux, tirés en provenance des ombres projetées par ses ennemis. D’immenses horreurs aux yeux gluants et démesurés s’attaquaient à la première ligne profanée, autant de pattes crochues et mortelles envoyèrent valser les malheureux dont le pavois ne fut déployé à temps. Néanmoin, les Kheijans n’avaient rien à perdre à combattre et s'offraient dignement en sacrifice afin de préserver la consécration de leur patrie. Le vert tueur entendait la musique, au rythme d’autant de marcheurs trépassés déjà, acceptant avec ferveur cette dernière valse au profit de leur impitoyable maîtresse. Il en fut galvanisé, autant de percussions, de vents, de cordes, de nuances pourpre et de saillantes tonalités le fit accepter la main de Derna dans cette danse de malheur.
Après avoir traversé l’armée abyssale, les survivants gagnèrent la surface et débouchèrent sur un véritable sanctuaire naturel, une caverne au milieu de laquelle se tenait un interminable lac. En son centre, un îlot de maçonnerie ancienne faisait office de phare, pourtant sombre et oppressant. Une profonde malveillance étudiait la troupe à mesure que ses vicieux et vociférant laquais goûtait l’épée d’Aon.
Des mètres de forêt souterraine, malade et corrompue les ceinturaient, ainsi préservée dans une latente agonie par le fruit d’Endicia. Le Daelwena ne put s'empêcher de faire une halte puis tonner un requiem muet à Solicia afin qu’elle touche ces aberrations, ces âmes maudites, de son souffle fécond.
Lorsqu’il regagna la troupe, elle avait traversé l’immense pont en pierre de sable qui menait à ce qui ressemblait être leur purgatoire. À l’approche du îlot, l’oppression malveillante s’intensifia à un point tel que le gardien des abysses lui-même hoqueta, sa gorge nouée par une peur sans nom. Ses terminaisons tremblaient et sa volonté fuyait à travers son serment fissuré pour avoir trop longtemps trempé dans ce mal saisissant. Les doutes l'assaillent comme autant de ces vicieux amphibiens qui l'avaient nargué de leurs lances effilées. Ce fut le courage des vertueux hommes des sables défilant sans mots vers l’infini noirceur qui le rendit humble. Une main à son épaule lui rappela une énième fois qu’il n’était pas seul à porter ce fardeau, qu’il pourrait toujours compter sur les peuples des vivants.
Résolu, les fervents du soleil passèrent ce mal à l’épée et gagnèrent le îlot où les attendaient la source de cette immonde corruption.
Un ancien sceau avait été brisé par le déplacement de quatre statues, chacune d'elles porteuse des piliers qui forment l’essence du peuple Kheijan. Le protecteur, le guerrier, l’arcaniste et le nomade furent restauré dans l’ordre qui colmaterait la blessure du monde, à cette brèche chaotique d’où provenait cette pollution endicienne.
Au retour de leur victoire, le Daelwena avait déjà disparu sous le soleil, n’ayant laissé derrière qu’un récent souvenir de sa contribution. Il n’avait pas besoin d’or, de reconnaissance ou de remerciement puisque pour le vert vigile, la paix de savoir son ennemi repoussé était suffisante. Tout comme le cycle sempiternel, le chaos se manifestera éternellement et ce encore bien après sa mort. La question n’était pas quand mais où? Et une fois son avancée révélée ...
Le gardien des abysses serait là.
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