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 Sombres réflexions par Kilath le Nargolith

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Cytix, Mortanyss

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MessageSujet: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyVen 20 Nov - 21:48

Citation :

Le début de la fin I

Il est tard. Je ne saurais dire quelle heure, avec certitude, mais il est tard. En surface, l’obscurité domine probablement le relief, même les endroits les plus dégagés. J’estime que la nuit est tombée depuis de longs moments. Ce soir, les heures sont longues, mais dans mon esprit, le temps file à une vitesse folle.

La Guide responsable de ma cohorte est venue troubler une nuit de songes tourmentés plus tôt. C’est assez fréquent, que l’un de nous soit amené à part subrepticement. Parfois, c’est permanent. Je l’ai appris à mes dépends : il est préférable de ne pas s’attacher. Les meahs sont à éviter.

Les quartiers publics me servant de chambre avec plusieurs autres jeunes Nargoliths ne sont après tout rien s’apparentant à un lieu de quiétude et de privauté. Telle est la vie d’un enfant de Sombrum. Les plus résilients survivent. Les plus faibles périssent. Nous apprenons, une vie d’Hastane durant, à comprendre que nous ne sommes que des pions. Ceux choisis, les plus méritants, peuvent atteindre la surface après une soixantaine d’années. Je ne saurais dire exactement où je suis dans ce processus, dans cette évolution. Je me sens vieux et fatigué, mais sans savoir, sans connaissance. Je ne fais que suivre la parade. J’ignore tout de la suite et du présent. C’est ce qu’on nous enseigne. Ce soir cependant, j’ai peur.

J’ai peur parce que plus tôt, la Guide venait pour moi. Elle était accompagnée de deux hommes. En fait, je crois que c’en étaient. Leur silouhette m'était inconnue et ils étaient sombres comme la nuit. Craignaient-ils opposition de ma part? Ils étaient tous trois agités. Sans que je puisse placer le moindre son, ils m’ont bandé les yeux et m’ont trainé de force dans une chambre, une toute petite pièce, sans autre issue qu’une petite porte. Je ne sais pas où je suis. Mon instinct me dit que ce n’est pas une cellule, même s’ils l’ont fermé à clé. La Guide m’a remis quelques vivres. Quelques fruits, de l’eau, sans plus. Sauf plume et papier. Sans doute voulait-elle que j’exprime mes peurs et mes songes les plus sombres en écrivant. M’aider à y voir plus clair. Sans doute avait-elle raison, dans son éminence. Avant de m’y enfermer, elle m’a dit que l’Échiquier s’agitait en surface. Que ma sécurité était compromise. Que j’allais rester quelques jours ici. Elle a disparu aussitôt. Présentement, j’ai envie de crier. Je ne peux pas le faire. Ma sécurité est compromise. Rien de tout cela ne fait de sens pour moi. Mais qui suis-je pour douter. Ce soir, j’ai des questions. Ce soir, j’ai envie de voir ma mère.  

Mes parents, je n'en ai pratiquement pas de souvenirs. Je me souviens vaguement de ma mère, cependant. De sa douceur. Dans mes souvenirs les plus lointains, c’est une Nargolith magnifique. Mes parents m’ont remis au Clergé en Sombrum’Dalan quelques années après ma naissance. Je n’ai aucune idée comment ils vont. La Guide sait, elle, ce qui me donne espoir de les revoir un jour. Suis-je coupable seulement, de ressentir de l’espoir. Bien entendu, je n’oserai jamais lui demander de leurs nouvelles. Ce serait signe de faiblesse et on me fouetterait pour cela, et peut-être plus. Quant à mon père, je n’en ai aucun souvenir. Je sais juste qu’il est là. Je sens sa sombre présence. Je ne saurais l’expliquer là, tout de suite. Je dois y réfléchir. J’aurai le temps, si on ne me tue pas bientôt.

Le temps. Combien de temps devrai-je rester ici? Aurai-je le temps de voir la surface? Est-ce que je pourrai revoir mes parents, en temps? La Mère Lune me fera-t-elle cadeau d’assez de temps pour accomplir davantage? Combien de temps durera-t-elle la partie d’échecs, me concernant?

Si je dois mourir ici, là, tout de suite, demain, ou après-demain, soites. Qui suis-je, pour défier le temps qui m’est alloué, de toute façon.

K.



Dernière édition par Kilath le Dim 22 Nov - 23:18, édité 1 fois

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Cytix, Mortanyss

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyDim 22 Nov - 12:58

Citation :
La rédemption

Aujourd'hui j'ai grandi. Enfin, au sens figuré. À une quarantaine d'années de vie environ, parce que je ne le sais avec certitude, j'estime qu'il relèverait du miracle de croître encore en hauteur. Et je ne crois pas au miracle. J'apprends davantage chaque jour ici, sous terre.

Au moment d'écrire ces mots, ma voisine de quartier, Zusanna, manque à l'appel. Je ne croirais pas la revoir de sitôt. Ou peut-être que jiu. Mais là n'est pas la question. Est-ce qu'être devenue ombre et poussière par la volonté de l'Astre Mère est considéré comme "manquer à l'appel"? J'y crois de moins en moins. Je l'aimais bien, Zusanna. C'était une erreur de ma part.

Plus tôt cet après-midi, elle a paniqué. Elle nous répétait sans cesse qu'elle avait besoin de voir la lumière. Juste un petit peu, qu'elle disait. Sentir le vent frais sur sa peau. Toucher aux fleurs. Je ne peux pas dire que je lui en veux. Je partage sa détresse également d'ailleurs. Mais de le partager avec sa voix serait une grave erreur. Zusanna a fait une grave erreur.

Je l'ai vu quitter en hâte vers un passage qui mène à la surface. Juste un petit instant qu'elle disait. Je n'ai pas tenté de la retenir. J'ai réfléchi. Que devais-je faire? Si je gardais son secret. si je la protégeais, le Château l'aurait su. Leurs spectres auraient su. Ils savent tout. Ils voient tout. On ne peut pas les déjouer.

J'ai déjoué mon propre instinct et je l'ai dénoncé. C'était la chose à faire. À ce moment du moins, j'avais la certitude que c'était la chose à faire. C'était une grave erreur. Pas de l'avoir dénoncé, mais de croire que j'avais le luxe du choix en la matière. Qui suis-je, pour décider de ce qui m'arrive.

On m'a amené aussitôt vers cette petite salle. Trois cellules et quelques jouets. Un peu de sang aussi. Beaucoup de sang. Les résultats de jeux dangereux, peut-être. Ou les fruits de l'amour de la Lune Mère. Ou peut-être, s'agit-il de la même chose.

Mon chef a été couvert d'une sombre cagoule et on m'a retiré mes vêtements. Je ne sais trop ce qui me trouble le plus, entre avoir été vu nu, ou ne pas savoir combien de personnes étaient présentes. L'ultime honte. Mais j'avais tord.

Le premier coup de fouet a pénétré ma chair facilement, provoquant un bruit strident dans la lugubre pièce. La douleur était insupportable. Je crois même qu'une plaie refermée a été ouverte à nouveau. La voix de la Guide, douce et posée comme d'habitude, me demandait si je comprenais ce que j'avais fait de mal. Ou ce que je n'avais pas fait.

Puis un autre coup.

J'étais bouche bée. J'ai essayé de parler. J'ai même essayer de crier. Sans succès. J'étais en douleur. Mes jambes tremblaient. Le sang coulait le long de celles-ci.

Aujourd'hui, j'ai failli. J'ai failli à comprendre les nuances. J'ai falli à la discrétion. Est-ce que de dénoncer Zusanna a servit Sombrum? Je commence à comprendre. Qu'est-ce qui me dit que Zusanna agissait contre la volonté du Seigneur? Je commence à comprendre. Qui suis-je, pour me faire juge de ce qui est bien, ou mal, ou de même croire qu'il y a une différence entre les deux pôles?

Puis, un troisième coup, car je le méritais. Aujourd'hui, j'ai douté du Château. J'ai failli à me souvenir de la seule certitude qui existe, celle que Nasticia est partout, et son élu, notre Seigneur, sait tout. Je commence à comprendre. À une quarantaine d'années de vie, je commence à comprendre.

On m'a retiré ma cagoule. On m'a jeter mes vêtements et laisser seul, comme une bête meurtrie et blessée. Je suis resté allongé là, dans mon propre sang, couché sur le dos, pendant plusieurs minutes. Ou heures. Je ne sais plus. Entre extase et honte. Dans un état second. Aujourd'hui, je n'ai pas été puni. J'ai été récompensé. Récompensé d'une journée de plus à vivre. D'un apprentissage supplémentaire. Le perfectionnement n'est pas une option. J'avais tord d'avoir honte.

Si Zusanna aura servit à quelque chose, c'est bien cela. Il s'agit d'une digne existence, après tout.

Ce soir, mon sommeil sera paisible.

K.

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Cytix, Mortanyss

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptySam 28 Nov - 2:09

Citation :
Le début de la fin II

Cette cellule, qui n’est est pas une, qu’est-elle, exactement? Surtout, avant moi, à quoi servait-elle? Une toute petite pièce, de la taille d’un vestibule. Complètement vide. Parfois j’entends l’écho de lourds pas sur le plancher de pierre, au loin. J’entends aussi gémir à l’occasion. Crier. Assez souvent même. Mes yeux de jeune Nargolith n’ont pas vu maints hivers, mais je sais que quelque chose se passe. Que quelque chose est en mouvance à la surface et les effets s’en font ressentir ici. Même moi, enfermé comme un animal en cage, individu sans importance et sans signification, je le ressens.

Je ne sais trop depuis combien de temps exactement je suis ici. J’en perds la notion. J’ai la certitude que parfois, je ne dors pas pendant ce qui m’apparait être plus d’un jour, rongé par ces questions qui me pourrissent l’existence. Puis je tombe d’épuisement. Déshydraté, sous-alimenté, mes ‘’nuits’’ sont souvent trop longues. Dangereusement trop longues. Tranquillement, je me laisse glisser dans la pénombre, vers la mort, je le sens. Puis je me réveille, poussé par une force quelconque. Comme si mon heure n’était pas venue. Comme si le temps du trépas n’était pas arrivé. Mais si je suis ici, c’est parce que ma vie est toujours en danger, silaie?

Tantôt, la guide est venue me porter de l’eau, du pain et des bougies. J’ignore à quand remonte la dernière fois que j’ai mangé, mais ça fait longtemps. Cela me donnera certainement quelques jours de plus, au besoin. J’ai eu quelques hallucinations au passage. Je crois que j’ai vu mon père. Il me parlait. Il me parlait de ses tourments. De son existence. De notre existence. D’élévation. Je n’y ai pas compris grand-chose. Mais il me parlait, je crois. C’est flou.

J’observe la bougie se consumer d’elle-même. Ici, c’est la seule chose qui me procure un semblant de stabilité. La seule constante dans le chaos de mes pensées. Les bougies qui brûlent au même rythme, l’une après l’autre. Ça me réconforte. Du moins, au début. Plus la bougie s’achève, plus un profond sentiment d’angoisse m’envahit. D’impuissance. Comme si mon heure arrivait. Comme si j’étais complètement dépendant de ce temps. Et puis ça recommence. C’est insensé, je sais. Ou peut-être que ce ne l’est pas totalement.

Est-ce que je le saurai, quand mon temps sera venu? Quand la bougie de ma vie sera consumée en entier?

Je l’ai appris ici, dans cette cellule, en observant les bougies brûler, prisonnier de mon corps. On ne peut pas déjouer le temps. Nous sommes à sa merci. Même nous, les Nargoliths, sommes à sa disposition. Je ne sortirai d’ici que quand on me le dira. Je rejoindrai peut-être la surface, quand on me le dira. La Lune Mère est au-dessus des aspirations personnelles. Les ambitions personnelles n’existent pas. Tout arrive en temps. Comme la mort. En quoi la mort serait différente? D’ici la mort, je ferai mon devoir. Comme tout Nargolith.

S’agit-il d’accomplir le plus possible dans le temps qui nous est alloué? S’agit-il de s’abandonner complètement, improvisant, sachant que notre bougie sera un jour achevée de toute façon?

Je l’ai compris maintenant. Mon plus grand ennemi est le temps. Je ne pourrai pas l’apprivoiser. Je ne pourrai jamais dompter le temps. Personne ne le peut. La Lune Mère contrôle notre existence via le temps. Nous en sommes esclaves.

Maintenant, je le sais. Et je ne l'oublierai jamais.

K.

*Puis il avait dessiné une image, sous le texte. Une image vaut mille mots, il paraissait.*


Sombres réflexions par Kilath le Nargolith Image011

Image: Niryn T'sy Voltora. Merci!Smile

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyLun 14 Déc - 23:42

Première partie, ici: https://uo-terra.forumactif.com/t5835-vivre-et-mourir-en-quelques-actes

Citation :
Le début de la fin, conclusion

C’était fait. Enfin. Kilath avait observé sa victime de longues minutes durant. Il l’aurait bien fait pendant l’éternité, s’il avait pu contrôler le temps. Elle gisait au sol, expression courroucée toujours visible sur son visage inanimé. Il tenait le cœur de l’ex-nouvelle Baronne jouvencelle en main. Pour une dernière fois, il avait pris ce qu’elle lui avait donné. Cet organe symbolique, ce cadeau lugubre et finalement, l’objet du trépas de la Leinth, avait eu plusieurs significations. Ce sacrifice était nécessaire. Pour sa libération. Kilath était maintenant libéré. Pour leur élévation. Fhai’Vanth s’élevait, maintenant.

Son manteau, ses mains et son visage étaient couverts de sang, cette substance rouge qui avait autant de valeur à ses -leurs- yeux. Il se pencha doucement sur la morte, avançant ses longs doigts aux traits félins sur ses yeux afin de les fermer, pour une dernière fois, à l’aide du majeur et du pouce, simultanément. Il allongea le geste et son touché descendit le long de ses joues jusqu’à son cou, juste au-dessus du sternum, la couvrant de sang au passage, pour s’enquérir d’un phylactère qui renfermait une améthyste de laquelle une sombre aura semblait s’émaner. Il avait délaissé le cœur l’instant d’un moment, pour diriger son autre main sur un bijou identique, qu’il portait, signe peut-être d’une élévation commune.


- Réjouis-toi, ma Vanth. Tu t’élèves maintenant vers notre Mère. Je te rejoindrai, le moment venu., lui avait-il murmuré, bien près de l’oreille.

Ayant déposé le cœur dans son sac, il lui retira un bracelet qu’elle portait ensuite. Ce dernier était sombre, un petit sablier incrusté à l’intérieur, contenant le sang en substitut au sable. Il l’avait inséré à son poignet, juste à côté du sien, identique. Il avait fait signe à deux domestiques du domaine baronnial, au préalable achetés pour leur silence visiblement, afin qu’ils l’aident à soulever le corps inanimé sur sa monture, en position assise, contre son corps, devant celui-ci. Le Cavalier et sa victime s’éloignèrent donc, dans la nuit, vers la forêt profonde.

Il chevaucha dans le crépuscule pendant près d’une heure, avant d’arriver sur une petite plaine, habitat de végétation déjà morte à priori, clairement un clin d’œil aux activités de la Fhai. Au milieu de la plaine, un grand trou creusé d’avance, sans doute le geste était prémédité. Sans perdre une seconde, il bondit en bas de sa monture, agrippa le corps et le déposa au fond de la profonde cavité, avec toute la douceur possible. Il amassa une fiole d’huile qui avait été placée près, puis en quelques secondes, le corps n’était plus visible sous les flammes. Avant de partir, Kilath, jeta un Cyprès entier dans le trou en feu. Sans doute, le superstitieux Cavalier désirait, dans un dernier élan, représenter l’immortalité spirituelle. Et Le Cyprès représentait l’immortalité.


- Adieu, Fhai.

Sans regarder derrière, il avait repris place sur son destrier kheijan et avait chevauché, au trot, vers Sombrum, s’éloignant du coup d’un épais brouillard sombre qui s’était formé au-dessus du site.

Il arriva tard dans la nuit. Sombrum était calme ce soir-là. Il entendait seulement les sabots de sa monture qui aurait pu guider les oreilles attentives vers la Caserne. Il y rentra, pour y composer une petite lettre, déposée à postériori sur le bureau du Recteur.


Citation :
Voyez ici, Recteur, ma démission du poste de Lieutenant Noir et de la Garde Sombre.

Kilath.


Il se dirigea ensuite vers Sombrum’Dalan, au sous-sol. Il admira plusieurs minutes cet étang, symbole lunaire nasticien, qui renfermait plusieurs de leurs secrets maintenant, ses doigts dansant sur les deux bracelets identiques, se rappelant peut-être une dernière fois les moments passés à cet endroit. Puis, machinalement, il jeta les deux sombres bracelets dans l’eau, lesquels avaient coulé aussitôt.

Avant de partir, il avait rejoint ce banc de bois, au fond de la pièce, pour graver, à l’aide de sa dague et sous celui-ci, les noms suivants :

Vanth Leinth
Kilath Cael'Tar

Une fois remonté à la surface, il s’était dirigé vers les morbides douves du Château et sous le regard incrédule des deux exécuteurs, il y avait jeté le cœur de la Baronne défunte. Kilath les avait que très brièvement sondé du regard, regard stoique, glacial, comme eux d'ailleurs.

Il avait rejoint alors la façade de l’auberge de Méducia, là où sa mère, Niryn, se trouvait. Au fond de lui, il savait. Pour se libérer de ces tourments, de ces sentiments affectueux, de ce fardeau handicapant, il devrait la tuer. Une bonne fois pour toute. Consacrer son existence à Nasticia. Sans distraction affaiblissante. Il demeura de longues minutes devant le bâtiment, plongé dans la nostalgie, les remords, et la peur. Il n’avait pu bouger. Il était figé, là, comme un esclave de ses sentiments. Comme un sbire du temps, qui lui rappelait là, plus que jamais, qu’il était le réel maître. Et il s’était éloigné, lui laissant la vie sauve. Il n’aurait pu commettre l’ultime acte de délivrance. Cela le hanterait sans doute pour le restant de ses jours. Et sans doute voulait-il, dans un élan d’empathie ou d’amour peut-être, lui éviter le chagrin de se savoir, une fois de plus, laissée seule.

Il galopa vers le pont pour le traverser. Son pas était maintenant décidé. Il avança quelques mètres et son cheval s’arrêta. Kilath jeta un dernier coup d’œil vers Sombrum, la magnifique, la terrible Sombrum. Un frisson lui parcourait l’échine, tandis qu’il s’apprêtait à quitter la cité, peut-être pour toujours. Il tenait dans une main, son phylactère améthyste, toujours à son cou, et dans l'autre main, son objet fétiche, un sablier, le regard fixé vers l’horizon. Puis, avant de s’éloigner vers Sud-Ouest, il le jeta par terre, tout bonnement, près de l’entrée. Le sable avait rejoint, en totalité, une extrémité de l’objet.

Son temps était achevé, apparemment. Jusqu’à la prochaine rotation.

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyVen 22 Jan - 20:54

Citation :
La fin: Jour 4

Ma chevauchée pour Najar'Him fût prompte. J'ai grassement payé pour ma protection et tenir le secret de celle-ci. Nous avons des similitudes, Belal Shareef et moi. c'est une homme de foi. On se ressemble dans la différence. Sans lui faire confiance, je sais qu'il n'a aucun intérêt à me vendre. Pour l'instant.

Je n'ai pas dormi depuis les récents événements. Depuis que j'ai pris ce qui m'appartenait, une bonne fois pour toute. Depuis que je nous ai libéré. C'était pour le mieux, je le sais. J'aimais Vanth. Elle m'aimait. Ce qui devait rester relation platonique vouée à l'élévation a failli. Ça nous affaiblissait. Ce qui devait être fait a été fait.

Loin de tous ces tourments, mon esprit s'illumine. Le voile psychique qui m'assaillait s'émancipe au gré du temps qui passe. Ah, le temps.

Ce n'est pas la première fois que je me retrouve dans cette situation. J'y suis habitué. Mais pourtant, cette fois-ci, je vois clair. Les réponses à mes questions.

Mon sommeil est paisible. Dans ma petite tente, au milieu du désert, sans contact outre mesure, je suis enfin libre.

K.C.

Citation :
La fin: Jour 22

Cela fait un peu plus d'une vingtaine de jours que je me cache ici. J'ai réussi à garder le compte. À peu près. Le Pacha Shareef me fait apporter du thé et des vivres, pour survivre. Chaque jour, c'est la même femme. Elle semble me regarder avec de plus en plus de questions. Je décèle la crainte. Pourtant, tout va bien. Je ne lui veux pas de mal. Elle silaie plus.

Il semblerait que des Nargoliths sont venus pour me chercher. Sûrement pas parce que j'ai tué une Baronne. Mais à cause de ma lignée.

Parfois, je pense à elle. À ce que nous avons vécu. Mais je l'oublie, vite. C'était la chose à faire. Je me sens mieux depuis qu'elle n'est plus là. Enfin, je pense.

J'ai l'impression que mes nuits s'écourtent. Dès que le puissant soleil de Sina'Far quitte l'horizon, un corbeau se pose au sommet de ma tente. Un corbeau, dans le désert. C'est étrange. J'ai beau le faire fuire, il revient. Chaque fois. Enfin, je ne sais pas si -il- revient. Mais j'entends croasser sans cesse. Tant pis. Il me tiendra compagnie.

K.C.

Citation :
La fin: Jour 49

Corvus ne me visite plus chaque soir. Je ne comprends pas. Je lui ai pourtant dit que j'appréciais sa compagnie. Il m'a expliqué beaucoup de choses sur la vie. Et la mort. J'espère qu'il reviendra. Quand il n'est pas là, je me sens seul. Même la femme qui m'apportait mes vivres ne se rend plus jusqu'à moi. Elle les laisse là, à une dizaine de mètres de ma tente. Je ne sais trop.

Chaque nuit où il n'est pas perché sur ma tente, j'entends crier. Un cri de souffrance constant. Je n'en dors plus. J'ai beau fermer l'oeil de longues heures, je n'entends que ça.

Mon heure est peut-être arrivée. Je combats la folie qui tente d'avoir raison de moi. Je refuse de croire à ce que j'entends. Je l'entends, elle. Comment est-ce possible? Je n'y crois pas. La Mère Lune ne peut pas m'en vouloir à ce point. J'ai fait ce qu'il fallait.

Parfois, l'épuisement me gagne et je m'endors. Puis je me réveille en sursaut et en sueurs.

Les cris sont omniprésents dans ma tête.

Puis Corvus revient. Et je peux enfin souffler.

K.C.

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyDim 7 Mar - 23:53

Citation :
La fin: Jour 52

Corvus m'apprivoise. Je pense. Il m'aime bien, au fond. Pourquoi me voudrait-il du mal? J'espère qu'il apprécie ce petit nom, que je lui ai donné. Ce n'est pas un simple corbeau. C'est un meah, je pense. Il n'est pas comme les autres. Il m'écoute. Je me suis confié à lui plus tôt. Ça ne parle pas, un oiseau. Mes secrets sont bien gardés, avec Corvus.

Hier, je me suis confié à lui. Pour la première fois depuis l'acte, je m'en suis voulu. Je ne m'en cache pas, j'ai toujours été un individu tourmenté. L'Astre-Mère à l'oeuvre, assurément. Mais de culpabiliser, j'y étais étranger. Et si c'était une erreur, de l'avoir tué? Et si son dessein céleste n'avait pas été livré suite à son départ? Je ne puis expliquer ce doute qui m'assaille. Mes pensées valsent entre les questionnements incessants, la honte et la peur. J'en rêve constament, la nuit. J'en rêve le jour. Je l'entends crier. Je revois son visage courroucé.  Et si c'était une erreur?

Silaie. Ça ne peut être une erreur. L'erreur est de croire que tout n'était pas déjà planifié par la Lune Sombre. Elle devait mourir. Sisilaie, elle serait encore là. C'est comme ça.

Corvus, tu ne sais pas lire mais musi d'être là.

K.C.

Citation :
La fin: 80 jours?

Je dors sporadiquement. Au moins, je dors. Est-ce que je dors? Je ne sais plus. Je préfère ne pas savoir. Un énorme bain de sang. J'ai l'impression de m'y noyer quand je dors. Un coeur. Mon coeur. Il transperce mon corps. Il le quitte, littéralement. Et je reprends conscience, sous le regard incrédule de Corvus. Musi d'être là, Corvus.

Note à moi-même: on s'y fait, à la cuisine kheijanne.

K.C.

Citation :
La fin: Environ 100 jours

Aujourd'hui, on m'a apporté une lettre avec le déjeuner.  Elle provenait de ma mère, Niryn. Le Pacha Shareef a dû mettre la main dessus. Elle veut des réponses. Quand ma mère veut quelque chose, elle l'exige. Et elle l'obtient. Je vais les lui donner, les réponses. Elle me manque. Terriblement? Pire. J'aurais dû lui faire mes vaels. Elle comprendra, je pense. J'ai demandé de l'aide à Corvus. Il lui portera un message pour moi, en temps.

J'ai dû enlever mon phylactère améthyste, aujourd'hui. Son poids est devenu trop lourd. Le bijoux me ronge la peau. Il me la brûle. Je ne peux plus l'endurer. Je le garderai précieusement.

K.C.

Citation :
Qu'est-ce que la fin?

Cette nuit sera marquée dans ma mémoire à jamais. Mes souvenirs de celle-ci transcenderont le temps et ses barrières limitantes.

Je le savais. Corvus est un meah. Il m'a livré un message.


Citation :
Le temps.

Qu'est-ce que le temps?
Il m'échappe, pour m'être désormais étranger.
Malgré moi j'y pense, pourtant.  
Une seconde, une heure, une éternité, se valent dans l'immortalité.

Le temps, maître inflexible, qui force ses esclaves en sa folle danse
Le temps, soi-disant ennemi qu'on ne peut jamais défaire.
Présomption, mensonge soufflé, ou encore ignorance?

Car moi, je l'ai vaincu, et j'observe sa course effrennée.
Avec douce-amère pitié pour les enchaînés et obéissants
Me rejoindront-ils, leurs yeux ouverts, leurs entraves brisées
Seront-ils soumis, ou seront-ils transcendants?


Le temps, c'est mon plus grand ennemi. C'est l'objet de mes tourments, de mes réflexions. Toute ma vie (et à toutes mes morts), j'ai cherché une façon de le déjouer. De l'apprivoiser.

Cette nuit, je me rapproche de mon but. Ce message provient de moi-même. Dans un autre espace-temps, peut-être. Une autre époque. Une seconde dimension. Je ne sais silaie. Mais qui d'autre que moi signe ses lettres avec un sablier? Sablier cassé, en sa base. Les grains de sable se sont volatilisés, comme si le temps n'existait plus. Ça ne peut être que moi. Les lettres L-I-S sont identifiées. Lire les mots, jiu. Lire entre les lignes. Lire plus loin. Lire le temps? J'ai trouvé. J'ai déjoué le temps. Nasticia est derrière cela. L'est-elle?

Corvus est là lui. Cette nuit, nous célébrerons. Cette nuit sera grandiose. Demain aussi. Aujourd'hui, cette nuit, demain, tous des termes futiles maintenant. Le temps a été déjoué. J'ai réussi.

Corvus, nous sommes grandioses. La fleur de chrysantème que je t'ai offerte, arbore la avec fierté. C'est le symbole de l'immortalité. Car nous sommes immortels.

K.C.

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MessageSujet: Re: Sombres réflexions par Kilath le Nargolith   Sombres réflexions par Kilath le Nargolith EmptyMar 9 Mar - 14:32

Sombres réflexions par Kilath le Nargolith Captur12

Le Sina'Far était alors dominé par une lune sombre, sanglante, par ce ténébreux firmament pourpre, que le mortifère volatile amorça sa descente sur l'humble campement où le Nargolith au bord de la folie avait établit refuge.

La folie? Les multiples nuits sans répit, où son sommeil était davantage à état second, envahis par ces épisodes cauchemardesques, commençaient à avoir raison de lui.

Le meurtre de son aimée. L'abandon qu'il infligea, une fois de plus, à sa mère, sa seule famille vivante. Le sentiment d'être constamment en danger; on ne tuait pas une Baronne de Sombrum sans conséquence. La centaine de jours et plus, loin de la Sombre. Honte, confusion, peur, colère, tristesse, mélancolie...

La libération. L'absence de distraction futile. La possibilité enfin, pour le tourmenté Nargolith, de s'adonner à ses réflexions infinies sans endurer le monde extérieur et ses incongruités, ses soubresauts agressants. Le temps nécessaire à comprendre qui était son paternel et les motivations de ses choix. Les récentes découvertes, celles qui confirmeraient, à son avis, sa victoire sur le temps. Fierté, clareté, courage, bonheur, gaieté.

Les sentiments se collisionnaient tous. Ces déchirements et ces tourments omniprésents auraient eu le pouvoir rendre fou même les plus résillients. Et Kilath l'était certes.

Mais il était immortel. Il en était sûr. Il avait déjoué le temps. C'est ce qu'il croyait, du moins. Jusqu'à ce que Corvus se pose sur le petit banc près de sa tente, laissant tombé ce paquet, emballé grosso modo avec ce qui avait l'apparence d'un vélin ayant appartenu jadis à un jouveanceau humanoïde. Le Nargolith fugitif, pris d'un élan d'adrénaline, retrouva, et relevant d'un miracle, sa perspacité connue et se mit à l'étude de tous ces objets livrés...


Citation :
L'immortalité, mais pas la mienne?

Je ne sais plus. Un voile opaque brouille mon esprit. Corvus en sait plus qu'il ne le prétend.

Cyprès; cette plante présente en Sombrum. Mais aussi ce que j'ai jeté sur son corps en flamme, lorsqu'il était encore perceptible.

Un symbole floral n'est forcément pas assez fort pour la faire renaître.

Crystal de nox; cet ingrédient mortifère, celui dont se sert les êtres morbides et ceux qui les font revivre.

Elle était nécromancienne. Ou l'est-elle encore?

Flacon de sang; cette texture, me rappelle qu'un endroit. Celui d'où vient tous les cauchemars et toutes les horreurs de ce monde. Mais aussi, ce liquide qui est aussi sacré à mes yeux.

La... Nécropole...

Carte céleste; cette Lune de la Mort, en conjonction avec l'Astre-Mère, et le mystère de la représentation du duo.

Nasticia, et Endicia. Les Ombres et la Mort. Le Nargolith et le Mortanyss. Kilath et...

Est-ce elle? Est-ce vraiment elle? Je n'y crois pas.

Corvus? Puis-je lui faire confiance? Est-il vraiment mon meah?

K.C.

Et le Nargolith jeta un oeil, méfiant plus que jamais, au corbeau qui lui, croassait de façon presque provocatrice. À en faire frissonner. Les pensées se bousculaient, le passé remontait. Kilath plongea sa main rapidement en sa poche et y agrippa le phylactère améthyste retiré de son cou ensanglanté quelques jours auparavant, puis le lança vers Corvus. Dans un geste saccadé, témoignant d'une panique naissante et d'une confusion évidente, il le projeta vers l'oiseau noir. Pour le faire fuir? Pour livrer un message à son correspondant?

Puis Corvus marqua une pause, quelques secondes. L'animal et le Nargolith s'observaient, s'étudiaient. Seulement le vent désertique, soulevant le sable de ses bourrasques costaudes, ajoutait une trame sonore à ce froid moment.

Le volatile déploya ses ailes, aggripa le pendentif de ses pattes griffues et s'envola vers la nuit.

Demain serait grandiose. Tragique, mais grandiose.

Nox, Mortanyss aime ce message

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